Puisque la répétition est pédagogique, il serait intéressant de revoir à nouveau nos commentaires au sortir de l’élection Présidentielle en 2019. Les chiffres étaient suffisamment éloquents qui disaient l’état de délabrement avancé de notre « système » dit démocratique. La définition la plus simple de la démocratie étant : la « forme de gouvernement dans laquelle la souveraineté appartient au peuple. » L’unanimité n’étant pas courante, la majorité suffit à exprimer la volonté populaire et à légitimer la Délégation de pouvoir du Peuple souverain aux élus. Examinons, sous ce prisme, le résultat de la dernière élection présidentielle dans notre pays.
Le nombre d’Inscrits était de 6 683 043. Sur une population estimée autour de 16.000.000 dont une large majorité n’a certainement pas encore atteint l’âge de voter.
Le nombre de votants à été de 4 428 680. Ce qui porte le nombre d’abstentions à 2 254 363, ce qui est un chiffre très important qui exprime, entre autres, le désenchantement vis-à-vis d’un système dont on n’attend plus la prise en compte de nos aspirations et l’expression de nos volontés. Mauvais signal !
Puis, les résultats officiels se sont décomposés comme suit :
Macky Sall : 2 555 442 élu au premier tour
Idrissa Seck: 899 556
Ousmane Sonko: 687 523
Issa Sall: 178 613
Madicke Niang: 65 021
Bulletins blancs et nuls: 42 541
Ces résultats, à y regarder de près, établissent la légitimité fragile du Président élu Macky Sall. Et c’est cela qui explique, pour l’essentiel, l’appel au dialogue national le lendemain même de la proclamation des résultats. En effet, en cumulant le total des voix de l’opposition aux voix abstentionnistes, le Président se retrouve élu par une minorité du corps électoral. Cela est contraire à la définition de la démocratie. Stricto sensu. Cela n’est pas un plébiscite qui aurait donné les coudées franches pour gouverner, dans la sérénité, pour un dernier mandat du point de vue de la Constitution en vigueur.
Mais enfin cette épisode est dépassé. Ce qui le ramène à nos souvenirs c’est l’installation (enfin !) de la Commission pour le Dialogue National. Alors même que ce dialogue devrait servir à pondérer les résultats biaisés de l’élection présidentielle, on semble s’y engager en cumulant des malentendus. Partant de la légitimité fragile identifiée plus haut, interrogeons d’abord celle des « représentants du peuple » au dialogue national. Interrogeons la représentativité des personnalités aperçues hier à la salle des banquets à l’occasion de la cérémonie solennelle d’installation de la commission. Au plan politique, et au vu des résultats des dernières élections présidentielles, les deux poids lourds de l’opposition en l’absence du PDS, premier parti de l’opposition parlementaire, sont Idrissa SECK et Ousmane SONKO. Ils étaient absents. Le PDS n’a pas pris part à cette rencontre. Les nouvelles forces sociales en mouvement, dédaigneusement qualifiées d’activistes, non plus. Plusieurs autres acteurs politiques constants sur la scène publique n’étaient pas à la salle des banquets. En revanche que d’illustres inconnus !
Le dialogue national semble donc parti sur un bien mauvais pied. À moins qu’avec l’habileté et le préjugé favorable dont il jouit, le Président Famara Ibrahima Sagna ne se donne les moyens de convaincre les récalcitrants pour légitimer les résultats attendus du dialogue national. Cela semble prioritaire dans un contexte d’ajustement structurel et de morosité économique pour les ménages. Même si les taux de croissance affichés voudraient nous faire croire le contraire.
En un mot comme en mille, les coups de bluffs, les tours de passe-passe et les arnaques politico-constitutionnelles permettent de passer en force ou de maintenir l’illusion. Mais la réalité est la seule vérité. Elle est têtue par définition. Il y’a des moments où il faut se donner les moyens d’entrer dans l’Histoire. Les petites ruses et les astuces ne relèveront toujours que de la petite histoire…
Amadou Tidiane WONE
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