Protection de vie privée : Ciré Aly Ba, 1er président de la Cour suprême, fixe les limites

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Intervenant à la cérémonie de rentrée des cours et tribunaux, le premier président de la Cour suprême, Ciré Aly Ba, a fait cas des limites de la protection de a vie privée.

“Le droit à la protection de la vie privée n’étant pas  un droit absolu et ne constituant nullement un dogme, il nous faut en préciser les limites. La protection de la vie privée peut parfois subir un infléchissement du fait des nécessités induites par le « droit à la preuve » qui est un succédané des droits de la défense. 

La jurisprudence impose cependant, pour ce faire, un cadre assez strict, en exigeant que l’atteinte soit indispensable à l’exercice du droit à la preuve et qu’elle soit proportionnée au but poursuivi.  

Mais de nos jours, les limitations les plus draconiennes imposées à la vie privée s’expliquent par le souci d’assurer la sécurité publique et collective, face à l’émergence de nouvelles formes de criminalité et à la nécessité de les prévenir ou d’en rechercher les auteurs. 

Le nouvel article 677-26 du Code de procédure pénale, issu de la loi n° 2016-30 du 08 novembre 2016 relative à la poursuite et au jugement des actes de terrorisme et autres actes assimilés, en offre une illustration. 

D’autres limitations, encore plus consistantes, sont introduites par la récente loi n° 2021-34 du 21 juillet 2021 relative à la criminalité organisée. 

Cette loi prévoit à l’article 677-67 nouveau que lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction concernant l’un des crimes ou délits énumérés à l’article 677-65 le justifient, le Procureur de la République ou, après avis de ce magistrat, le juge d’instruction saisi, peut autoriser qu’il soit procédé, sous leur contrôle respectif, à une opération d’infiltration. L’infiltration consiste, pour un officier ou agent de police judiciaire à surveiller des personnes suspectées de commettre un crime ou un délit en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou receleurs. L’autorisation donnée à cet effet est délivrée par écrit et doit être spécialement motivée. 

La loi prévoit en outre, si les nécessités de l’enquête l’exigent, aux articles 677-76 et 677-77, des perquisitions, visites domiciliaires et saisies, à toute heure du jour et de la nuit, tant pour les enquêtes de flagrance que pour les enquêtes préliminaires. Concernant les saisies et ouvertures de correspondances, l’article 677-82 du Code de procédure pénale prévoit que si les nécessités de l’information relative à l’une des infractions commises en bande organisée l’exigent, le juge d’instruction peut autoriser l’officier de police judiciaire, par ordonnance motivée, l’accès à distance et à l’insu de la personne visée, aux correspondances stockées par la voie des communications électroniques accessibles à partir d’un identifiant informatique.  

L’opération est effectuée sous l’autorité et le contrôle du juge et ne peut, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées dans la décision de ce magistrat. 

Enfin, au titre des écoutes et surveillances, il résulte  des termes de l’article 677-84 que le juge d’instruction peut,  après avis du Procureur de la République, autoriser les officiers et agents de police judiciaire à mettre en place un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, la fixation, la transmission et l’enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou publics,  ou de l’image d’une ou de plusieurs personnes se trouvant  dans un lieu privé. 

Il convient de signaler pour clore ce chapitre sur les limitations apportées au secret et à la liberté de la vie privée que le droit positif sénégalais n’admet aucune cause d’irresponsabilité pour l’euthanasie, qui demeure un acte homicide.

Ni l’état de nécessité, ni le consentement de la victime ne peuvent justifier un acte médical visant à mettre fin à la vie d’une personne à sa demande. La règle intangible dans notre société étant que seul Dieu donne la vie et peut la retirer. 

Ainsi le fameux débat sur la fin de vie, qui agite en ce moment l’Occident, n’a pas encore cours chez nous. Il n’y est pas question  de dépénalisation de l’euthanasie.

Dans ce même registre des interdits, l’article 319 de notre Code pénal punit d’un emprisonnement de un à cinq ans les actes impudiques ou contre nature avec un individu du même sexe. 

D’aucuns – et parfois des sommités de ce monde – y ont vu  une atteinte à la vie privée et à la liberté de vivre sa vie. 

Vous n’avez cependant jamais fléchi dans ce domaine, Monsieur le Président de la République, gardant le cap et soutenu en cela par l’écrasante majorité des citoyens de ce pays.     

J’aimerais à cet égard et en guise de conclusion vous emprunter quelques phrases de votre discours d’adieu prononcé  à la tribune de l’Assemblée générale des Nations Unies ;  vous y disiez : « Entre peuples libres, dont l’histoire et les réalités socioculturelles sont diverses, il ne peut y avoir de légitimité  pour certains de définir et imposer à tous une seule façon de vivre,

comme un          « prêt    à             porter   civilisationnel ».               Ensemble,  nous pouvons pratiquer nos valeurs communes. Mais ensemble, nous devons respecter nos différences ». 

Je vous remercie de votre aimable attention. 

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