Prochaine assemblée nationale : rupture ou continuité ?

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À trois mois des élections législatives, les Sénégalais s’interrogent sur leur avenir et se demandent si enfin, la prochaine Assemblée nationale sera le reflet de leurs aspirations. En d’autres termes, si les députés qui seront élus assumeront enfin leur rôle, qui est de contrôler l’action gouvernementale. Parce que depuis la crise de 1962, l’Assemblée nationale est devenue une annexe de l’exécutif qui la manipule à sa guise. Pire, l’Assemblée nationale censée être celle de la rupture, sous Macky Sall, n’a pas apporté les changements attendus. Aussi, ces Législatives seront décisives pour l’avenir du Sénégal, parce que les populations qui sont devenues de plus en plus conscientes des enjeux, souhaitent une Assemblée de rupture.

Les prochaines Législatives seront âprement disputées par les partisans de la rupture et ceux de la continuité. Parce que depuis la crise de 1962 entre Senghor et Mamadou Dia qui avait abouti à la caporalisation du Législatif par l’Exécutif, les populations ne sentent pas tellement l’utilité des députés alors qu’ils devraient être les défenseurs de leurs intérêts au sein de l’Assemblée nationale. Mais ce combat ne sera pas tout aisé, si l’on sait que le pouvoir actuel ne lésinera pas sur les moyens légaux et illégaux, sur les armes conventionnelles et non conventionnelles pour se tailler une majorité, sinon c’en sera fini de lui.

Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’il a entrepris cette vaste campagne de débauchage des maires et l’imposition du parrainage, malgré l’injonction de la Cedeao. Sans compter les réunions tous azimuts et autres ndoggu pour remobiliser les troupes. Actuellement, tout ce qui importe au «génie politique» est de décrocher la majorité, peu importe la manière, l’essentiel étant que la fin justifie les moyens. Pourtant, opposant, le candidat Macky Sall s’était engagé à réformer le mode d’élection des députés, parce que celui de l’époque et qui est toujours en vigueur, favorisait ceux que l’on appelle les députés du président.

Ce qui fausse tout le jeu, si l’on sait qu’en République, la séparation des pouvoirs est un principe sacro-saint pour vivifier la démocratie. Mais, quand le président peut se permettre de mettre les députés de son choix sur les listes nationale et départementale, cela leur ôte toute légitimité populaire. Élu pour être audessus de la mêlée et instaurer une démocratie apaisée dans le Sénégal avec des pouvoirs équilibrés, le Président Macky Sall n’a jamais pu assumer ce rôle et a choisi une démarche partisane dès le début de son magistère.

C’est dans ce cadre qu’il a renié ses engagements et continué à faire la même chose que ses prédécesseurs en procédant à une gestion sans partage du pouvoir. Et les douzième et treizième législatures ont été parmi les plus désastreuses, avec des scandales à la pelle à l’Assemblée. Des scandales qui vont du faux-monnayage au trafic de passeports diplomatiques et qui ont secoué le parlement, mais que le pouvoir a tenté de minimiser.

Comme du reste, ces députés du président ont évité de demander des comptes au gouvernement concernant la destination des 750 milliards destinés au plan décennal de lutte contre les inondations, la gestion nébuleuse des 1000 milliards du Fonds Covid-19, suscite moult questions de même que le bradage du foncier ainsi que celui des ressources pétrolières et gazières etc. Pour dire que face à ces nombreux scandales qui jalonnent le règne des apéristes, le parlement est aux abonnés absents. Pas un acte posé pour amener le pouvoir à s’expliquer devant la représentation nationale.

Concernant les hausses tous azimuts des prix, idem : pas un mot pour soulager le dur vécu des populations ! Quoi de plus normal, rien ne leur est refusé, ils sont grassement payés en sus des dessous de table et autres petites faveurs. Au moment où les populations sont pressées comme des citrons par un pouvoir qui n’hésite même plus à faire du «Adu Kalpé» avec les hausses tous azimuts des prix des produits de consommations.

Au même moment, ces députés laissent à l’État le soin d’accorder des exonérations de complaisance aux multinationales, alors que cette prérogative leur est dévolue. Mais ils semblent l’ignorer et privent les populations de cette manne financière qui se chiffre à des centaines de milliards et qui pourraient beaucoup contribuer à alléger leurs souffrances.

Tout cela ne semble guère émouvoir ces députés qui ne roulent que pour leurs intérêts et ceux de leur bienfaiteur. C’est pourquoi, ces élections devront être l’occasion pour tous ceux qui aspirent à la rupture de mettre un terme à ces genres de pratique. Pour ce faire, la mise en place d’un front uni s’impose, afin de parvenir à l’élection d’une majorité de députés qui joueront leur rôle en termes de contrôle de l’action gouvernementale et non des députés mange-milliards.
Tribune

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