Le Sénégal a jeté à la poubelle plus de 400 mille doses de vaccins contre le Covid-19. Faute d’utilisation, ces doses sont devenues périmées ; les populations ayant rechigné à aller se faire vacciner. On peut être en colère devant une telle situation, mais on préfèrerait rester quelque peu circonspect. En effet, la vaccination n’étant pas obligatoire, les autorités de l’Etat ne pouvaient que constater la situation, en dépit de campagnes assidues d’incitation des populations à se faire vacciner pour endiguer la pandémie. Chacun est libre de se faire vacciner ou pas. Mais, la vaccination à grande échelle était apparue comme la panacée pour venir à bout de ce mal, qui pollue l’atmosphère de la vie du monde depuis la fin de l’année 2019. Ainsi, au Sénégal, la demande avait été forte d’exiger du gouvernement, de tout mettre en œuvre pour trouver des vaccins pour sa population. Le casse-tête avait été d’arriver à dégotter de rares doses de vaccins pour les populations, des doses chèrement vendues par les laboratoires qui étaient assaillis par des demandes pressantes.
C’est ainsi que le gouvernement du Sénégal a pris l’initiative de passer commande de lots de vaccins en quantité importante et à un coût qui a pu mettre à mal le budget de l’Etat, déjà assez éprouvé par les contrecoups de la pandémie, avec leur lot de baisses des recettes fiscales et de dépenses exceptionnelles pour la prise en charge des malades et surtout, les actions en vue de la préservation du tissu économique. La solidarité mondiale a été invoquée pour aider les pays pauvres à pouvoir trouver des vaccins dans une période de course avec des pays plus nantis, qui ont semblé avoir fait mainmise sur les grosses quantités de vaccins. Ainsi, n’a-t-on pas accusé les pays riches d’un certain égoïsme et l’opinion publique a préconisé une certaine équité ou justice sanitaire. Des doses de vaccins ont été offertes, çà et là, à des pays pauvres, dans le cadre d’une coopération bilatérale ou sur un modèle multilatéral avec l’initiative Covax, de l’Organisation mondiale de la santé (Oms), coordonnée par l’Alliance pour le vaccin (Gavi).
Le Sénégal a bénéficié de dons de la part de la France, de la Chine, des Etats-Unis d’Amérique, du Royaume-Uni, de l’Inde, du Portugal, de l’Oms et de l’Union africaine. Des ressources budgétaires ont été réaffectées en urgence pour acheter des vaccins. Le Sénégal, dont la gestion de la pandémie par les autorités publiques a été citée en exemple à travers le monde, a bénéficié d’une certaine «prime» dans la distribution des dons de vaccins. Malgré tout cela, le scepticisme des populations a été grand devant la perspective de se faire inoculer des doses de vaccins. Des théoriciens du complot ont alimenté la rumeur d’une dangerosité des vaccins fournis aux pays africains. Des considérations religieuses ont été invitées dans le débat, jusqu’à ce que la suspicion eût fini de gagner la majorité de la population. Le scepticisme a d’autant été renforcé au Sénégal que des leaders politiques et non des moindres, avec une posture de se mettre en situation d’opposition systématique à toute politique gouvernementale, ont fait douter de la pertinence de la vaccination ou de la bonne qualité des produits distribués au Sénégal. L’opposition sénégalaise doutait dans un premier temps de la capacité du gouvernement à pouvoir fournir les vaccins demandés.
Le Président Sall, sans doute excédé par de tels propos et procédés, a eu à montrer son exaspération par une déclaration qui aura créé un vacarme quand il disait, au moment du lancement de la campagne de vaccination en février 2021, que «si les Sénégalais ne voulaient pas des vaccins», il allait «les donner à d’autres pays qui en auraient le plus besoin».
Aujourd’hui, il peut être triste de constater que le Président Macky Sall a finalement eu raison sur ses nombreux détracteurs ou pourfendeurs. Il aurait été sans doute plus judicieux de donner des vaccins à des populations d’autres pays, qui auraient souhaité se faire vacciner et qui malheureusement n’en ont pas eu l’opportunité. Des personnes ont sans doute pu mourir du Covid-19 dans des pays proches du Sénégal, faute d’avoir pu accéder à la possibilité de se faire vacciner. Qu’à cela ne tienne, le Président Macky Sall n’en a pas moins pris l’initiative de la création d’une unité industrielle de production de vaccins. Ainsi, le Sénégal et le Rwanda se mettent à implanter des usines de fabrication de vaccins pour le continent africain, en partenariat avec la firme pharmaceutique BioNtech. Seul 1% des vaccins utilisés en Afrique est produit sur son sol et l’objectif est de porter ce taux à 60%, à l’horizon 2040. La même firme BioNtech, qui vient en outre de mettre au point un vaccin contre le paludisme, se positionne favorablement sur ce créneau.
Qu’avons-nous fait pour nous épargner du pire ?
Toutefois, on ne devrait pas jeter la pierre qu’aux seules personnes réfractaires à la vaccination. La relative désorganisation des opérations de vaccination contre le Covid, avait quelque part pu être la cause de certains manquements, qui ont conduit à la situation de devoir en arriver à jeter à la poubelle des doses de vaccins. On se rappelle que des personnes ont été éconduites des centres de vaccination, en application d’une procédure aveugle de catégorisation des âges pour la vaccination. A titre d’exemple, le Sénégal n’avait pas autorisé la vaccination des personnes âgées de moins de 18 ans, et ainsi, des personnes adolescentes ont été refusées au niveau des centres de vaccination. La colère des parents a pu être forte quand ces enfants ont, par la suite, chopé le virus. Force est de dire que la vaccination aurait pu les préserver ou, à tout le moins, leurs cas auraient été moins virulents si ces enfants avaient bénéficié préalablement d’une vaccination.
En outre, le dispatching des vaccins entre les différents districts de santé du pays, a pu être hasardeux car on a observé, qu’au moment où des vaccins ont été jetés à la poubelle quelque part, il existait par ailleurs des régions médicales où des responsables ont eu à élever la voix pour protester contre la rareté des vaccins, face à une affluence de candidats à la vaccination.
L’absentéisme et le laxisme des personnels de santé ont également été un handicap pour le bon déroulement des opérations de vaccination.
Il reste qu’il sera désormais bien difficile à des pays comme le Sénégal, de faire la morale aux pays riches pour n’avoir pas fait montre de générosité pour aider les populations à se protéger de la pandémie grâce à la vaccination. A quoi bon leur donner des vaccins qui ne serviront pas ?
Au demeurant, l’appréciation unanime des médecins et autres spécialistes des problèmes de santé publique, est que les personnes ayant été vaccinées font mieux face à la pandémie. Une recrudescence de la pandémie est observée dans tous les pays et ainsi, au Sénégal, on commence à dénombrer des cas qui peuvent inquiéter sur la capacité de résilience de notre système de santé. Les services des urgences de certaines structures hospitalières commencent à être débordés et la prise en charge efficace des patients souffrant d’autres pathologies, devient de plus en plus improbable. Certes, cette nouvelle vague, portant l’empreinte du variant Omicron, semble moins létale que ses devancières, mais le trop-plein de patients au niveau des structures hospitalières pourrait causer à terme, des dommages imprévisibles. Les espoirs de relance économique s’en trouveraient compromis et les économies des pays africains, qui ne sont pas encore sortis de l’ornière, seraient encore davantage éprouvées.
Le débat ne se posera pas au Sénégal, comme c’est déjà le cas en France par exemple, où on discute de la question de la prise en charge ou non des personnes malades du Covid-19 et qui avaient refusé de se faire vacciner convenablement. Ce débat procède d’une réflexion par l’absurde, car nul ne saurait envisager de ne pas porter secours et assistance à des malades qui se présenteraient devant un service de santé, encore que refuser de traiter les malades équivaudrait aussi à exposer à la contamination toute autre personne.
C’est dire qu’il est de notre responsabilité à nous tous, pour n’avoir pas assez fait contre la pandémie. Déjà, le respect des gestes barrières et des mesures de prévention a fait défaut partout. Qui s’est soucié autant du Covid-19 dans nos baptêmes, deuils et autres cérémonies familiales ? Quel responsable politique ou étatique s’est réservé d’éviter des rassemblements de populations en tenant compte de risques certains de propagation des virus ? Qui, dans cette campagne électorale qui s’est ouverte le week-end dernier pour les élections locales du 23 janvier 2022, se soucie tant soit peu de la montée des statistiques de contamination au Covid-19 ? Quel procès public n’a-t-on pas fait contre toutes les velléités de fermer les lieux de culte pour préserver la santé des populations ? Les bars, restaurants, boîtes de nuit et autres lieux accueillant du public restent ouverts à tous les vents et virus. En fin de compte, le Sénégal en revient à la formule tant chahutée, de devoir «vivre avec la maladie».
Les nouvelles statistiques sont galopantes. Le variant Omicron gagne du terrain et presque tout le Sénégal se trouve subitement pris d’un petit rhume, d’une petite grippe, de petites migraines, de quelques courbatures, d’un mal de gorge, d’une éruption de fièvre ou d’on ne sait encore quel autre problème de santé. Peut-être que l’intérêt de tout cela est qu’on finira par en arriver à une immunité collective que la vaccination n’a pas pu offrir. N’est-ce pas que nous sommes un peuple élu de Dieu et qu’on arrive toujours en nous en sortir ? Les voies du Seigneur demeurent impénétrables ! Le Dr Robert Malone, qui a fini de faire sa réputation pour être un des inventeurs du vaccin Arn, affirme que «Omicron est tellement infectieux et peu pathogène qu’il est l’équivalent d’une vaccination mondiale gratuite à virus atténué. C’est le plus beau cadeau de Dieu et signera la fin de l’épidémie». Finalement, on peut se demander si véritablement Omicron viendrait d’Afrique du Sud et non du Sénégal ?
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