Par Demba Moussa Dembélé
Le livre du Professeur Makhtar Diouf sort au moment où le débat s’intensifie sur la nécessité d’un changement de paradigme en Afrique, après le constat de faillite des politiques de « développement » imposées de l’extérieur, depuis les « indépendances ». Cependant, la voie vers ce changement est semée d’embûches, parmi lesquelles les pesanteurs externes et internes.
S’affranchir des pesanteurs coloniales et postcoloniales
L’idéologie coloniale, développée et propagée par de grands écrivains et hommes politiques européens, est la source des pesanteurs coloniales et postcoloniales. Cette idéologie, destinée à avilir le Noir et à justifier sa subordination, avait préparé le terrain à la Conférence de Berlin (1884-1885), qui a partagé le continent entre les puissances impérialistes européennes de l’époque. La colonisation créa les conditions pour le pillage des ressources de l’Afrique au bénéfice de l’industrialisation de l’Europe, comme l’a magistralement démontré Walter Rodney dans son ouvrage Comment l’Europe a sous-développé l’Afrique.
Dans la période postcoloniale, ce pillage a continué sous la forme de l’échange inégal à travers le commerce international et les transferts de ressources par l’intermédiaire du service de la dette extérieure africaine. Pour donner le change, les pays occidentaux et les institutions sous leur contrôle ont proposé des programmes « d’aide au développement » qui ont contribué à accentuer la dépendance de l’Afrique.
Dans les ex-colonies françaises, la défense du franc CFA a donné lieu à des assassinats, meurtres et coups d’Etat sanglants, qui ont renforcé la servilité des « dirigeants » à l’égard de l’ancienne métropole. De manière générale, la plupart des « dirigeants » africains manquent de patriotisme économique, ignorent la rationalité économique et acceptent la soumission aux puissances étrangères. Leur gestion des ressources publiques est caractérisée par la gabegie, la corruption et le népotisme.
Se libérer de ces pesanteurs est une condition nécessaire pour jeter les bases d’un changement de paradigme. Cependant, l’Afrique ne peut faire fi de l’expérience des pays développés qui contient des enseignements qui peuvent lui être utiles. Selon l’avis d’éminents intellectuels, de Karl Marx à Cheikh Anta Diop, en passant par Paul Samuelson et Josef Schumpeter, tout pays a intérêt à apprendre de l’histoire économique d’autres pays
Les enseignements de l’histoire économique
En examinant les expériences des pays occidentaux et asiatiques, l’un des enseignements majeurs à retenir est le rôle décisif joué par l’industrialisation, comme force motrice du développement. La Révolution industrielle, qui a démarré au milieu du 18e siècle en Angleterre, s’est ensuite répandue aux autres pays européens et aux Etats-Unis au cours du 19e siècle. Les facteurs ayant contribué à cette industrialisation sont la rationalité économique ; la contribution des « capitaines d’industrie », le rôle central de l’Etat, ainsi que l’industrie du fer-acier et le chemin de fer. La rationalité est un concept né au 18e siècle avec les philosophes des Lumières, dans leur combat contre l’obscurantisme du système féodal. L’économie politique, également née au 18e siècle, avec la publication du livre d’Adam Smith, La richesse des Nations (1776), sera fondée sur la rationalité économique, synonyme d’efficacité, de recherche d’efficience et d’évitement de gaspillage dans l’utilisation de ressources rares. L’économie néoclassique reprendra à son compte cet héritage des classiques.
Les « capitaines d’industrie sont parmi les acteurs majeurs du développement de ces pays. Ce sont ceux qui ont pris des risques pour investir dans différents secteurs économiques de leurs pays. Parmi eux, le Pr. Diouf cite Cornelis Vanderbilt, John D. Rockefeller, Andrew Carnegie, Thomas Edison, aux Etats-Unis. En Europe, on retiendra les noms de Dassault, Citroën, Renault et Peugeot (France) ; Daimler, Benz, Bosch et Siemens (Allemagne) ; Agnelli (Italie) et Philips (Pays-Bas). Au Japon, il y a Honda et Toyota, en Corée du Sud, il y a Hyundai. .
Un autre acteur de premier plan dans l’industrialisation de ces pays est l’Etat. Que ce soit aux Etats-Unis, en Europe, au Japon ou en Corée du Sud, l’Etat était l’incarnation du patriotisme économique. Il avait créé des entreprises publiques et protégé les secteurs considérés comme stratégiques, pour les soustraire au contrôle du capital étranger. Cependant, le rôle de l’Etat sera quelque peu remis en cause par les économistes néoclassiques, adeptes des politiques de « laissez-faire ». Mais celles-ci seront discréditées après la crise des années 1930, ce qui a permis le retour en force de l’Etat, comme acteur économique incontournable. L’Etat était au cœur du New Deal duprésident Franklin D. Roosevelt, qui a sorti les Etats-Unis de la Dépression grâce à des investissements publics massifs. L’Etat était aussi au centre de la Reconstruction de l’Europe après la Seconde Guerre mondiale.
Si certains des enseignements évoqués ci-dessus peuvent être utiles à l’Afrique, en revanche, on peut s’interroger sur la pertinence des modèles de croissance transposés aux pays africains.
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Les modèles de croissance : quelle pertinence pour l’Afrique ?
Une interrogation d’autant plus légitime que les modèles de croissance étaient une préoccupation des pays occidentaux confrontés aux fluctuations économiques liées à la crise des années 1930. En outre, selon le Pr. Diouf, les concepts de « croissance », « taux de croissance » et « revenu national » furent énoncés pour la première fois en 1928 en Union soviétique, dans un article écrit par un ingénieur de l’électricité du nom de Gregory Feldman. C’est après que ces concepts furent l’objet d’études empiriques et théoriques aux Etats-Unis, avec comme précurseurs des émigrés d’origine soviétique, comme Simon Kuznets et Evsey Domar. Robert Solow du Massachusetts Institute of Technology (MIT) et Roy Harrod, de l’Université Harvard furent parmi les autres grands théoriciens des modèles de croissance, dont l’un des plus connus est le modèle Harrod-Domar.
Curieusement, d’après le Pr. Diouf, il n’y a aucune mention du mot « croissance économique» dans La Théorie générale de l’emploi, de l’investissement et de la monnaie de John Maynard Keynes, qui était pourtant la figure dominante des débats économiques de l’époque en Occident. C’est que Keynes s’intéressait plus à l’expansion économique qu’il situait dans la courte période plutôt qu’à la croissance économique qui, à ses yeux, se situait dans la longue période.
Donc, les modèles de croissance sont un produit de la Dépression et de la Guerre froide, qui seront transposés dans les pays non-développés par la Banque mondiale et le FMI. C’est pourquoi ces modèles ne sont guère pertinents pour les pays africains, de l’avis du Pr. Diouf.
Dans les pays développés, la croissance économique est impulsée de l’intérieur. Elle crée des emplois et des richesses qui permettent d’améliorer le niveau de vie des populations. Par contre, dans les pays africains, la croissance économique est principalement tirée par les exportations de produits de base, qui entraînent des transferts de richesse vers l’extérieur, contribuant ainsi à l’échange inégal, un thème cher aux théoriciens de la Dépendance. Cela explique pourquoi les taux de croissance observés en Afrique n’ont pas contribué à réduire le chômage et la pauvreté, encore moins à transformer les structures des économies africaines. La Banque africaine de développement (BAD) et la Commission économique pour l’Afrique (CEA) indiquent que malgré des taux de croissance, parmi les plus élevés du monde, l’Afrique compte le plus grand nombre de personnes pauvres. Les drames récurrents de jeunes Africains perdant la vie dans la Méditerranée ou dans le désert du Sahara sont un témoignage éloquent de l’échec des modèles de croissance. Il est dès lors difficile de comprendre le « fétichisme de la croissance » qu’affichent certains économistes et dirigeants africains, sans doute fourvoyés par la Banque mondiale qui assimile « croissance économique » au « développement ».
Quels indicateurs de développement ?
Mais la croissance économique n’est pas le développement, même si elle en est un élément important. Selon le Pr. Diouf, c’est Josef Schumpeter qui a introduit le terme « développement économique » dans la littérature économique. Le concept était contenu dans son livré publié en allemand, plusieurs années avant son exil aux Etats-Unis. C’est à la suite de la sortie de l’édition anglaise du livre que le concept deviendra un sujet d’étude et de recherche aux Etats-Unis et dans d’autres pays occidentaux, à partir des années 1940. C’est également à partir de cette période que le terme « sous-développement » fut utilisé dans un discours du président des EtatsUnis, Harry Truman. Cela contribua à susciter l’intérêt pour les problèmes économiques des pays dits « arriérés ». Ce qui donnera naissance à l’économie du développement, dont les pionniers sont, entre autres, Colin Clark, Rosenstein-Rodan, Paul A. Baran, Ragnar Nurkse, Arthur W. Lewis et Albert O. Hirschmann.
Cependant, comme les théoriciens de la croissance, tels que Simon Kuznets, Roy Harrod ou encore Walter Rostow – l’auteur du livre Les cinq étapes de la croissance économique- ces pionniers confondaient croissance économique et développement, mesuré par le PIB ou le revenu par tête. Mais cet indicateur a été l’objet de nombreuses critiques. Ces critiques ont fini par amener les Nations-Unies à introduire en 1990, le concept de développement humain, qui comprend le revenu réel, l’espérance de vie et le niveau d’éducation. C’était une avancée notable, mais pas tout à fait satisfaisante, pour le Pr. Diouf. Parce que le développement humain n’incorpore pas la valeur ajoutée manufacturière (VAM), considérée comme le meilleur indicateur de développement, car, « pays développé est synonyme de pays industrialisé ».
Quelles voies de développement pour l’Afrique?
Donc, de l’avis du Pr. Diouf, l’industrialisation est le pilier du développement de l’Afrique. Un point de vue déjà exprimé par le Pr. Cheikh Anta Diop, dans son ouvrage Les fondements économiques et culturels d’un Etat fédéral en Afrique noire. Il faut rappeler que le Plan d’Action de Lagos (PAL) avait comme objectif majeur l’industrialisation du continent. Il sera torpillé par la Banque mondiale et le FMI qui imposèrent leurs programmes d’ajustement de triste mémoire qui entrainèrent la désindustrialisation de plusieurs régions du continent. Cependant, l’industrialisation en Afrique fait face à plusieurs contraintes, selon le Pr. Diouf
Les contraintes de l’industrialisation en Afrique
Parmi celles-ci, on peut citer le manque de capitaines d’industrie, l’équation du financement, le problème énergétique et les échecs de l’intégration économique.
Le manque de « capitaines d’industrie »
L’Afrique manque de « capitaines d’industrie », comme ceux évoqués dans les pays occidentaux et asiatiques. Certes, elle compte beaucoup de milliardaires et de grands banquiers, comme les fondateurs du groupe Ecobank et de Bank of Africa ou feu Pathé Dione (Sénégal). Mais seuls quelques-uns jouent le rôle de « capitaines d’industrie », comme Aliko Dangote (Nigeria), feu Cheikh Amar (Sénégal), Axel-Emmanuel Gbaou (Côte d’Ivoire) et Muhammad Dewji (Tanzanie), entre autres.
La contrainte de financement
Le manque de « capitaines d’industrie » et la faible mobilisation des ressources internes obligent les pays à faire appel aux ressources extérieures – publiques et privées- pour financer le développement. Les énormes cadeaux fiscaux accordés aux investisseurs étrangers privent les Etats africains d’importantes recettes budgétaires. A cela, il faut ajouter les pertes dues aux fraudes fiscales par les multinationales, opérant surtout dans le secteur extractif, qui contribuent aux flux financiers illicites, qui sont une véritable hémorragie financière pour le continent. Selon le rapport de 2020 de la CNUCED sur l’Afrique, les pertes annuelles dues aux flux financiers illicites sont estimées à 88,6 milliards de dollars ! Un montant que ni les investissements directs étrangers ni « l’aide au développement » ne peuvent compenser.
La faible mobilisation des ressources fiscales est aggravée par le faible niveau du financement bancaire des économies africaines, estimé à 22% du PIB comparé à 48% au niveau mondial, selon la BAD. Celle-ci, qui fête ses 60 ans cette année, a fait de l’industrialisation de l’Afrique un de ses projets-phares. Mais sa marge de manœuvre a été réduite après l’entrée dans son capital de pays étrangers, notamment les pays occidentaux. En ce qui concerne les banques régionales, comme la BOAD en Afrique de l’Ouest, leurs pratiques sont similaires à celles des banques commerciales, qui financent très peu de grands projets industriels.
Cette situation condamne les pays africains à recourir de plus en plus à l’endettement extérieur, avec l’accroissement rapide de la dette privée, devenue un sujet de préoccupation au niveau continental et international. C’est surtout le cas pour les pays utilisant le franc CFA, qui les maintient dans la servitude et le non-développement. Pour les sortir de ce piège, le Pr. Diouf les exhorte à couper les liens avec la France et à adopter une monnaie commune souveraine. Le problème énergétique
Sur ce sujet, le Pr. Diouf rappelle la fameuse citation du Pr. Cheikh Anta Diop : « Au commencement est l’énergie : tout le reste en découle ». Cela veut dire que l’énergie est au cœur du développement de l’Afrique, qui regorge d’abondantes ressources énergétiques dans tous les domaines. Le problème est donc la formulation de politiques appropriées au niveau national, régional et continental pour les mettre au service de l’industrialisation du continent. Il y a quelques exemples de coopération dans certaines régions pour fournir de l’énergie hydroélectrique à plusieurs pays. En Afrique de l’Ouest, on peut citer les barrages de l’OMVS.
Les échecs de l’intégration économique
L’intégration économique a été au cœur des stratégies de développement de l’Afrique. Mais selon le Pr. Diouf, le modèle d’intégration des marchés adopté par les pays africains a été un échec. Même la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), ne constituerait pas la bonne solution. Elle est conçue sur le même modèle d’intégration des marchés et risquerait plutôt de favoriser l’exploitation du marché africain par les entreprises étrangères.
A la place du modèle d’intégration actuel, le Pr. Diouf propose un modèle basé sur l’intégration de la production, selon les trois filières ci-après :
– spécialisation par produits et par pays, avec comme débouché le marché communautaire
– coproduction entre un groupe de pays sur certains produits destinés aussi au marché communautaire
– création d’industries à vocation nationale produisant pour le marché local
Le Pr. Diouf indique que le Pr. Cheikh Anta Diop avait proposé, dans son ouvrage rappelé plus haut, une approche similaire basée sur des politiques sectorielles ayant pour cadre des régions choisies selon leurs dotations en ressources naturelles. .
Les autres dimensions économiques du développement
Si l’industrialisation est l’épine dorsale du développement de l’Afrique, celui-ci a, néanmoins, d’autres composantes économiques tout aussi incontournables. Comme l’agriculture, l’agroindustrie, l’élevage, la pêche, le tourisme et l’artisanat. Dans les pays développés, la révolution agricole a beaucoup contribué à l’industrialisation. Pour l’Afrique, l’agriculture est une des clés du développement. Elle est la principale source de revenu pour une large partie de la population et la solution au problème de souveraineté alimentaire, qui n’est pas un simple problème économique mais de sécurité nationale, comme l’a montré la pandémie du coronavirus.
Le rôle crucial des infrastructures pour le développement n’est plus à démontrer. Cela explique les nombreux chantiers d’infrastructures routières, ferroviaires et maritimes lancés un peu partout sur le continent. On note une prise de conscience du rôle essentiel du chemin de fer dans le développement, illustrée par la réhabilitation des réseaux existants et la construction de nouvelles lignes ferroviaires dans plusieurs régions.
Les dimensions non-économiques du développement
Le capital humain, la culture et la spiritualité sont d’autres dimensions qui jouent un rôle tout aussi important dans développement. Le capital humain est la somme de connaissances et d’expériences accumulées tout au long de la vie, comme l’éducation et la formation. Quant à la culture, elle peut être un grand catalyseur du développement, à travers les lettres, les arts, les modes de vie, les croyances, etc. Ce n’est pas un hasard si l’on parle aujourd’hui d’industries culturelles et créatives. La spiritualité, à travers la religion, peut jouer un rôle décisif dans le processus de développement. Le Pr. Diouf cite le grand sociologue allemand Max Weber qui a montré comment le Protestantisme a contribué à l’essor du capitalisme dans les pays anglosaxons. Cependant, ce dernier nie un rôle similaire à l’Islam, ce que réfute le Pr. Diouf.
Qui dit développement dit forcément Etat, comme acteur incontournable.
L’Etat comme acteur central
Le Pr. Diouf a exhorté les Etats africains à s’inspirer des exemples des pays occidentaux et asiatiques, dans l’industrialisation desquels l’Etat a joué un rôle de premier plan. Il continue de jouer ce rôle dans tous ces pays. On l’a vu aux Etats-Unis et en Europe pendant la crise financière internationale de 2008, avec la nationalisation d’entreprises et de banques pour empêcher leur faillite. Dans ces pays, le patriotisme économique a été renforcé par la notion de « sécurité nationale » pour justifier l’intervention de l’Etat dans presque tous les secteurs. Au nom de la « sécurité nationale », ces pays violent les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour protéger des secteurs menacés par la concurrence étrangère. Aux EtatsUnis et en Europe, il y a de nombreuses entreprises d’Etat, surtout dans des secteurs, comme les télécommunications, l’énergie, les transports et les technologies de pointe.
En Asie, on connaît le rôle central joué par l’Etat dans le développement fulgurant de ce qu’on appelle « Dragons » et « Tigres », ou encore au Japon et en Chine. La même observation s’applique au groupe des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud).
En Afrique, l’Etat était au cœur des politiques de développement durant les deux premières décennies des « indépendances ». La Banque mondiale et le FMI remettront ce rôle en cause. Au Sénégal, ces institutions avaient encouragé des inepties du genre « moins d’Etat, mieux d’Etat », qui ont fini par conduire le pays en 2001 sur la liste des « pays les moins avancés » (PMA), pays les « plus pauvres » du monde, selon les Nations-Unies. Et il y est toujours !
La faillite des programmes d’ajustement et leurs conséquences désastreuses ont fait prendre conscience en Afrique qu’il ne peut y avoir de développement sans un Etat actif et engagé. Cette prise de conscience a été exprimée avec force par la Commission économique des Nations-Unies pour l’Afrique (CEA) dans son rapport de 2011 : « Le consensus qui se dégage à ce sujet, c’est qu’un Etat développementiste est essentiel au processus de croissance économique accélérée et de transformation sociale d’un pays, quel qu’il soit ».
Pendant le mandat de Carlos Lopes, comme Secrétaire exécutif, la plupart des rapports annuels de la CEA avaient réitéré cet appel, insistant surtout sur le rôle de l’Etat dans l’industrialisation des pays africains. On retiendra donc que l’Etat doit être considéré comme un acteur central dans le développement de l’Afrique, et non comme un simple instrument au service du secteur privé et du marché, comme essaient de le faire croire les idéologues du néolibéralisme.
Conclusion
Le livre du Professeur Makhtar Diouf ressemble à un véritable cours magistral. Des fondateurs de l’économie politique au 18e siècle aux fondamentalistes du néolibéralisme débridé de nos jours, en passant par les économistes de la Dépendance, le livre n‘a oublié aucune des doctrines majeures qui ont marqué l’histoire de la pensée économique et du développement. Il apporte une importante contribution au débat sur le changement de paradigme en Afrique, en proposant des voies de développement dont le pilier central est l’industrialisation. Le livre tombe à pic et pourrait être une grande source d’inspiration pour le nouveau régime du Sénégal qui prône la rupture d’avec le système néocolonial actuel. Par-delà le Sénégal, le livre mérite d’être lu par les décideurs politiques, les chercheurs et les institutions régionales et continentales.
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