Mouvement Citoyen contre l’Accaparement et l’Aliénation des Terres du WALO (M.A.A.T-WALO)

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MEMORANDUM DU WALO

Au Peuple Sénégalais dans sa diversité et son entièreté ;

A Son Excellence, Monsieur le Président de la République ;

Aux Honorables Députés de l’Assemblée Nationale, élu(e)s du Peuple Sénégalais ;

A Mesdames/Messieurs les membres du Conseil Economique, Social et Environnemental ;

A Mesdames/Messieurs les membres du Haut Conseil des Collectivités Territoriales ;

A Monsieur le Médiateur de la République ;

Nous, filles et fils du WALO, venons porter à votre auguste attention, nos préoccupations interpellatives et notre indignation :

La région naturelle du WALO, principalement constituée par la région administrative de Saint-Louis, en l’occurrence par les départements de DAGANA, de SAINT-LOUIS et de PODOR, est confrontée à de très sérieux problèmes existentiels, découlant d’une occupation massive et anarchique de ses terres de culture, d’élevage et de pêche, par un phénomène d’accaparement et de spoliation sans commune mesure. A l’instar de nombreux pays pauvres d’AFRIQUE, d’AMERIQUE du sud et d’ASIE, le SENEGAL n’est pas épargné par la ruée vers ses terres.

En effet, depuis la crise économique et alimentaire mondiale de 2008 et l’effondrement planétaire des principales bourses financières de NEW YORK, NASDAQ, LONDRES, TOKYO, FRANCFORT, HONG KONG, SHENZHEN, SHANGHAÎ, EURONEXT, TORONTO, beaucoup d’investisseurs privés internationaux, d’états et d’industriels, se sont tournés vers la terre comme valeur refuge sûre, en lieu des placements traditionnels que constituaient le dollar américain et l’or. Le monde déboussolé, ne pouvait plus ignorer le danger qui guettait la sécurité alimentaire de toute l’humanité. Les « Traders » se firent leur, le fameux aphorisme de l’écrivain Américain MARK TWAIN : « Achetez de la terre, on n’en fabrique plus » !

Selon deux études récentes de l’organisation internationale non-gouvernementale GRAIN basée à BARCELONE en ESPAGNE et du CIRAD (Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement) en FRANCE, trente (30) millions d’hectares de terres ont été vendus en 10 ans dans le monde, entre 2006 et 2016, dont 43% des transactions concernaient les pays d’Afrique [1] [2]. Les acheteurs sont souvent des privés ou des pays étrangers à l’Afrique. Au SENEGAL, l’accaparement des terres est devenu un réel problème de société et les conflits et contentieux juridiques devant les tribunaux se multiplient à un rythme effrayant, avec parfois même malheureusement des pertes en vies humaines : les cas de deux morts à FANAYE DIERI dans le département de PODOR, le 26 octobre 2011, et d’un mort à SANGALKAM dans le département de RUFISQUE, le 30 mai 2011, en sont une parfaite illustration.

L’accaparement documenté des terres du WALO par des étrangers, a commencé le 08 mai 1819, avec la signature du fameux traité de NDIAW entre le BRACK AMAR FATIM BORSO et le Gouverneur Français JULIEN-DESIRE SCHMALTZ. Pour les WALO-WALO, il s’agissait d’une simple location temporaire, mais pour les Français, d’une acquisition définitive dans la compréhension du Droit Civil Français imposé par la force, avec immatriculation de titres fonciers et gestion quiritaire du foncier, contrairement à la gestion collective des terres, une philosophie purement africaine héritée de l’EGYPTE nègre pharaonique. Selon cette compréhension africaine, la terre ne pouvait pas être aliénée, ni par un PHARAON, ni par un BRACK du WALO. Cette incompréhension de deux paradigmes diamétralement opposés, a conduit à l’échec de la colonisation agricole du SENEGAL à RICHARD-TOLL, dès 1831, après douze années seulement d’existence, les WALO-WALO s’étant révoltés et ayant boycotté la colonisation agricole, par la désobéissance civile (refus de livrer la main-d’œuvre pour les plantations) et le sabotage des digues et infrastructures d’irrigation des colons.

Avec l’indépendance de notre pays, l’accaparement a pris une forme plus subtile, plus insidieuse, mais dans sa quintessence, elle n’a pas changé et constitue toujours une pomme de discorde entre les populations autochtones et les accapareurs et spoliateurs, qui ont revêtu une autre physionomie, moins attaquable et moins criarde.

Récemment, le tribunal de grande instance de SAINT-LOUIS avait mis en vente aux criées, un terrain de huit mille (8.000) hectares dans la commune de MBANE, qui a scandalisé nombre de nos compatriotes, pour la simple et bonne raison que ce site au bord du lac de GUIERS, abrite depuis la nuit des temps, plusieurs villages traditionnels de Peulhs, Toucouleurs, Wolofs, Maures, pour la plupart éleveurs et agriculteurs (Villages de NDIACK FALL, TEMEYE-LEWA, NDOUMBALENE, SAM-SAM, TEMEYE-TOUCOULEUR, SANDA, MAPODJI etc.). Le terrain a été attribué par voie de bail emphytéotique à la société OSBI appartenant à CHEIKH HAMIDOU KANE, qui l’a ensuite hypothéqué auprès de la Banque des Institutions Mutualistes de l’Afrique de l’Ouest (BIMAO), pour obtenir un prêt en vue d’un projet agricole. Ce projet n’a jamais vu le jour, aucun investissement en terme d’aménagements ou d’infrastructures n’a jamais été fait sur le site. Faute d’être remboursée, la BIMAO a saisi le terrain pour le vendre et réaliser sa garantie hypothécaire. Une Société Financière d’Intermédiation et de Commerce (SOFICO) aurait racheté le crédit à deux milliards (2.000.000.000) de FCFA, selon les propos de son avocat, et se retrouve adjudicataire de ce bail de l’état. La valeur vénale de ce terrain a été estimée à quarante-huit (48) milliards de FCFA par les experts immobiliers requis dans le cadre de la procédure judiciaire, à raison de 600 FCFA le coût unitaire du mètre carré.

Nous constatons par conséquent, que par une simple gymnastique de jeux d’écritures notariales et bancaires, on vient de vendre des terres en zone de terroir, avec des villages plusieurs fois centenaires qui y sont, à un privé, qui peut à tout instant faire procéder « légalement », avec l’appui des forces de l’ordre, au déguerpissement de ces hommes, femmes et animaux, ainsi qu’au rasement de leurs cimetières, mosquées et habitations. Une grande société de la place avait d’ailleurs, lors de la vente citée plus haut et finalement radiée, fait déposer par l’intermédiaire de ses conseillers juridiques, cinq cautions d’un milliard (1.000.000.000) de FCFA chacune, donc 5 milliards au total, pour s’assurer sans risque, l’adjudication dudit terrain.

Un second scandale est en gestation dans la même zone du Lac de GUIERS, avec l’accaparement de mille sept cents (1.700) hectares de terres octroyés à l’opérateur économique à feu ABDOU HAFIZ FAKIH, propriétaire d’un restaurant à DAKAR, qui voulait à l’origine y construire un centre touristique au bord du lac de GUIERS. Ce terrain a été ensuite illégalement transféré à son fils RABIH FAKIH, qui prétend vouloir maintenant y faire un projet agricole. Il a déposé une demande de transformation de la délibération du conseil rural en bail emphytéotique auprès du Ministère de l’économie et des finances. Les villages situés dans ce site (Villages de SANEINTE, POMO) et les paysans détenteurs de délibérations légales du conseil rural de MBANE, s’opposent à cet opérateur économique.

En dehors de ces deux exemples cités, le WALO fait face à plusieurs autres cas de spoliation et d’accaparement de ses terres, par des étrangers dans la commune de MBANE. Le plus spectaculaire de ces scandales, est l’octroi de cinquante mille (50.000) hectares à une personne morale. Cette surface correspond à la surface de toute la région de DAKAR, de NGOR jusqu’à SEBIKOTANE ! La valeur vénale de ce terrain est aujourd’hui de trois cents (300) milliards de FCFA ! Ces exemples sont loin d’être exhaustifs. Nous nous trouvons donc devant un phénomène dont l’ampleur ne peut être cernée avec exactitude, qu’après un audit sérieux et inclusif des terres concernées, de toutes les délibérations et titres de propriété délivrés à des tiers.

D’autres cas d’accaparement et de spoliation sont une source importante d’inquiétude et concerne le cas de SENHUILE S.A., ayant bénéficié de vingt mille (20.000) hectares de terres, après avoir été chassée de FANAYE-DIERI. Cette société au profit de laquelle, la réserve du NDIAËL classée depuis 1965, a été déclassée, a fait déguerpir 37 villages Peulhs, sans jamais initier un projet digne de ce nom.

Ce projet de SENHUILE est un échec patent. Pendant ses 7 années d’existence sur le sol sénégalais, elle n’a pas produit de tournesol comme promis. Au contraire, elle a préféré louer des terres aux paysans et éleveurs qu’on a chassé de leurs terres ancestrales, ce qui est formellement interdit par la loi sur le Domaine National et constitue un motif de résiliation du bail. Devant la levée de bouclier des WALO-WALO, l’entreprise a « généreusement » rétrocédé 10.000 hectares aux populations des communes de ROKH et GNITH, pour sauver les autres 10.000 hectares qui restent et y inscrire un droit de bail. Toute cette gymnastique n’est que spéculation ! Le WALO veut recouvrer l’intégralité des 20.000 hectares spoliés !   

La politique d’occupation des terres par la Compagnie Sucrière Sénégalaise (CSS), sans aucune mesure d’endiguement, constitue pour tout le WALO un handicap majeur et un danger permanent. Toutes les bonnes terres ciblées jadis par les Français pendant la colonisation agricole, à savoir les meilleures terres fertiles au bord du fleuve Sénégal et du Lac de GUIERS, sont accaparées par la CSS. Le drainage de ses eaux usées et d’irrigation sans traitement préalable par une station d’épuration, directement dans le Lac de GUIERS et la TAOUEY, qui approvisionnent en eau potable les régions de SAINT-LOUIS, LOUGA, THIES, DAKAR, entre autres, constitue une grande source de pollution qui met en danger nos ressources halieutiques et la santé de millions de Sénégalais. Il est grand temps, qu’un audit exhaustif soit fait sur les terres occupées réellement par la CSS dans le Département de DAGANA, ainsi que la conformité et la légalité de cette occupation par rapport aux lois et au contrat signé avec l’Etat du Sénégal. La publication du contrat entre l’Etat du Sénégal et la CSS, depuis presque 40 ans d’existence, est devenue une demande sociale et populaire impérative !  

Nous tenons à faire remarquer que dans toutes ces transactions passées et en cours, les dispositions de la Loi N°64-46 du 17 juin 1960 relative au Domaine National, ont été complètement ignorées. La loi sur le Domaine National stipule en son article 8, de manière on ne peut plus plausible, que « Les terres de la zone des terroirs sont affectées aux membres des communautés rurales qui assurent leur mise en valeur et les exploitent sous le contrôle de l’Etat et conformément aux lois et règlements ». En son article 13, elle ajoute en outre, que « l’Etat ne peut requérir l’immatriculation des terres du Domaine National constituant des terroirs affectés par décrets en vertu de l’article 11, que pour la réalisation d’opérations déclarées d’utilité publique ».

En outre, le décret N°72-1288 du 27 octobre 1972 relatif aux conditions d’affectation et de désaffectation des terres du Domaine National comprises dans les communautés rurale, précise que « l’affectation ne confère qu’un droit d’usage. Les terres affectées ne peuvent faire l’objet d’aucune transaction et notamment d’aucune vente ou contrat de louage »

Devant ces phénomènes récurrents, fondamentalement spéculatifs, et le potentiel objectif de conflits latents, nous en appelons au Président de la République, à la jonction de toutes les forces vives du WALO, mais également aux Députés de l’Assemblée Nationale, aux membres du CESE et du HCCT, au Médiateur de la République, aux Organisations non-gouvernementales, nationales et internationales, aux Organisations des Droits de l’Homme, pour qu’on mette fin à ces pratiques mafieuses.

Nous sommes conscients, que les tueries inacceptables au Mali, ne résultent pas directement d’un quelconque JIHADISME, mais plutôt d’un espace vital devenant de plus en plus restreint pour les DOGONS agriculteurs et les PEULHS éleveurs. Dans d’autres pays de la sous-région, la même problématique se pose. Ces catastrophes pourraient mettre en danger la cohésion sociale dans notre pays.

Pour cette raison, le WALO sollicite l’intervention urgente du chef de l’Etat du Sénégal, Son Excellence, le Président MACKY SALL, pour qu’il lui plaise, de prendre des mesures urgentes susceptibles de calmer les populations et de sécuriser leur espace vital, à savoir :

  1. Concernant le terrain de 8.000 hectares de CHEIKH HAMIDOU KANE adjugé à la SOFICO, le WALO demande au Président de la République, de prendre un décret de d’annulation pour cause d’utilité publique, du bail de l’Etat N°320/BS inscrit dans le livre foncier du BAS-SENEGAL, ainsi que l’annulation de la vente à la SOFICO ;
  • Concernant le terrain octroyé à ABDOU HAFIZ FAKIH et transféré illégalement à son fils RABIH FAKIH, les populations du WALO, conformément à la demande de l’ancien Conseil Rural de MBANE, par lettre N°035/ARR.MB/CR.MB du 09 septembre 2010, adressée au Directeur des Domaines et du Timbre du Ministre de l’Economie et des Finances, sollicitent le Président de la République, pour qu’il lui plaise d’arrêter la procédure d’octroi de bail à RABIH FAKIH. Si par extraordinaire le bail aurait déjà été octroyé, le WALO demanderait la désaffectation pour cause d’utilité publique et son affectation aux populations autochtones.

Le Président Bolivien EVO MORALES s’était illustré en expropriant 57.000 hectares de terres (plus que la région de DAKAR !) qu’un riche Américain, RONALD LARSEN s’était fait octroyer dans les plaines fertiles de la région du CHACO, en y faisant travailler les indiens GUARANI autochtones en semi-esclavage dans ses « Latifundia ». Toutes ces terres ont été redistribuées aux indiens. Par ailleurs EVO MORALES a transféré aux anciens esclaves noirs de Bolivie, les titres de propriété sur les terres et les châteaux qui appartenaient à leurs anciens maitres.

Le Président MACKY SALL pourrait faire beaucoup mieux que EVO MORALES, car les terres occupées dans le WALO, sont de loin supérieures à celles en BOLIVIE, et les conditions de travail

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