Au lendemain de l’alternance survenue le 25 mars 2000, le Général Lamine Cissé disait ceci, dans son livre, ‘Carnets Secrets d’une Alternance’ : «Le Sénégal a atteint un seuil de démocratie enviable pour tout le continent, qui le met au niveau de certains pays du Nord. Il ne faut pas que cela nous échappe. Il faut travailler pour que tout ce que nous avons appris et réalisé soit désormais un acquis permanent, qui puisse prospérer».
Malheureusement, le triste constat est que nous n’avons rien retenu de ce que nous avons appris et réalisé, aussi bien en 2000 qu’en 2012, et aujourd’hui, le Sénégal connaît une régression démocratique qui risque de le plonger dans les abysses si rien n’est fait pour redresser la barre.
Comment le Sénégal a pu en arriver là, 20 ans après la belle alternance réussie en 2000, et la passation de service idyllique entre Diouf et Wade ? Une question qui mérite réponse, parce que les présidents qui se sont succédé au pouvoir depuis l’avènement de la première alternance ne se sont pas évertués à approfondir les acquis démocratiques, mais se sont plus souciés de consolider leur pouvoir.
En fait, c’est comme si le manque d’idéal démocratique est la chose la mieux partagée par la classe politique, et l’habit de démocrate que nos politiciens portent ne dure que le temps d’une opposition. Une fois au pouvoir, ils n’hésitent pas à fragiliser, sinon à domestiquer, tous les contre-pouvoirs qui pourtant ont joué leur partition sans parti pris, et largement contribué à leur accession au pouvoir.
C’est ainsi que, aussi bien sous Wade que sous Macky, il y a eu une tentative de musellement de la presse et de la société civile, alors que la logique aurait voulu qu’elles soient protégées et renforcées, vu le rôle déterminant qu’elles jouent dans une démocratie.
Malheureusement, la seule et unique préoccupation de ces présidents aura été de tenter de les mettre sous coupe réglée, avec la carotte pour les dociles et le bâton pour les récalcitrants. Actuellement, tous les acquis démocratiques se sont rétrécis comme peau de chagrin, et l’on assiste à une sorte de retour à la case départ.
Nanti de ses pouvoirs exorbitants, le président agit selon son bon vouloir, sans qu’il y ait un moyen de l’arrêter. Il peut organiser des élections quand ça lui chante, se choisir ses candidats, éliminer ses rivaux gênants, avec l’aide de la justice, mettre en place un arsenal répressif considérable pour mater les manifestations des citoyens, un droit, qui pourtant est garanti par la Constitution.
Il peut même violer la Constitution pour avoir plus de mandats que prévu, avec l’aide de juristes complaisants et d’un Conseil constitutionnel aux ordres.
C’est comme si, sous nos cieux, quand on détient le pouvoir, on peut tout se permettre, organiser les élections sans la sincérité et la transparence requises, avec un fichier électoral dont on est le seul à savoir ce qui s’y trouve avec des règles du jeu biaisées.
Aujourd’hui, le combat fondamental pour arriver à une société vraiment démocratique, passe par l’érection d’une société civile forte, active, au fait des enjeux démocratiques et qui refuse de les laisser aux seules mains des politiciens qui en font leur chasse gardée.
Cela aidera à consolider les Institutions que les pouvoirs en place ne cessent de manipuler à leur guise.
Tribune
Soyez le premier à commenter