La réponse tardive d’une armée africaine par la force des choses et non par le fondement stratégique (Par Moussa kanté)

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Malgré des capacités colossales individuelles, les puissances mondiales cherchent en permanence à se coaliser pour des besoins sécuritaires car la démarche d’ensemble, la symphonie est la seule à être en mesure de venir à bout du chaos, de l’insécurité.
L’OTAN des occidentaux constitue une illustration parfaite de cet état de fait. Pendant ce temps, l’Afrique où les capacités sont moins considérables et le mal plus dommageable attendait une motivation supplémentaire à sa réunification militaire voire sécuritaire. Et aujourd’hui, c’est le vice planétaire qu’est le terrorisme qui pousse et impose cette mutualisation des forces au-delà de notre sous région, mais au niveau continental sans quoi nous serons encore plus ‘’aliénés’’, de moins en moins maîtres de
notre destin d’où une autre urgence imprévue comme le montre le cri de détresse du président burkinabé Kaboré : «le terrorisme a atteint un niveau très alarmant».
Pourtant, une armée africaine véritablement constituée et non seulement déclarée en attente sur le papier serait une dissuasion et au besoin une stabilisatrice à la victoire certaine.
-L’ineffectivité ou l’inexistence d’une indépendance de l’instabilité:
L’indépendance de bon nombre d’États africains, la soixantaine affleurante, l’heure devrait être à l’affirmation et à la fortification de nos acquis et aspirations. Soixante ans, c’est en effet un âge de vérité et de vérification des options suivies. Toutefois, l’instabilité de toutes sortes et de tous ordres, est une donne intégrante de la marche africaine. Si les conflits sont
soumis aux déterminismes de l’espace prévalent, l’Afrique n’en connaît pas moins une multitude de sources conflictuelles d’où notre continent a tout l’air d’un adulte mal dans son âge. En effet, dés le point premier ou primordial de la stratégie, est perceptible, un malaise motivé par une impossibilité de stratégie voire même une imposture de stratégie, une
discontinuité, une substitution de systèmes (politique, militaire, démocratique, despotique qui s’interrompent), une absence de vision saine et sereine; tant l’emprise déstructurante de l’instabilité est notoire. Ainsi, quelque soit la dotation naturelle et culturelle, sa conduite est
déterminante. L’ineffectivité ou l’inexistence d’une indépendance de l’instabilité, est sécrétrice et nourrice de toutes les autres sortes de dépendance. Motif ou facteur de braderies et de pillages de nos ressources, l’instabilité détruit l’existant et bloque tout progrès.

-LA GEOGRAPHIE DU CONFLIT EN AFRIQUE DE L’OUEST :
Fréquence, densité, localisation, déterminisme, et remèdes des conflits ouest africains :
S’il est un qualificatif à accoler, à la situation globale ouest africaine, c’est bien fragile. Par balisement et par tous les paramétrages possibles, à travers tous les canaux d’appréhension, sur tous les secteurs subissant et sévissant, concordent la précarité de la paix. Concrètement, en Afrique de l’ouest, hormis le pouvoir, la religion, l’appartenance ethnique; les conflits ont
des motivations de limites ou potentiels territoriaux. Et si on part de cette catégorisation faite du conflit, nous pouvons énumérer moult conflits et confrontations (leurs lieux et dates) dans chacune de nos catégories, en Afrique de l’ouest : Plus spécifiquement, les coups d’Etat réussis en Afrique de 1963 à 1991 variant de 0 à 6, nous sont désignés par (P Mc Gowan,
1986; D Bangoura, 1992; dans le monde (1986-1991, p234)): «Togo 1ere fois 1963 puis 1967; Bénin 1963, deux fois en 1965, 1969, et 1972 ; Burkina Faso 1966, 1974, 1980, 1982, 1983, 1987 ; Nigeria deux fois 1966, 1975, 1983, 1985 ; Ghana 1966, 1972, 1978, 1979, 1981 ; Sierra Léone 1967, 1968 ; Mali 1968, 1991 ; Niger 1974 ; Mauritanie 1978, 1980, 1984 ; Libéria 1980, 1990 ; Guinée Bissau 1980 ; Guinée 1984». Toujours, dans l’ouest africain sous le règne des conflits, la CEDEAO, avec l’appui des partenaires dits traditionnels, les
anciennes puissances coloniales notamment, a eu à secréter dans les années 90, la plus grande coalition militaire continentale appelée ECOMOG (les casques blancs). L’ECOMOG connut des fortunes diverses dans sa trajectoire mais arriva le plus souvent à maintenir l’Etat de droit.
D’abord, ce fut :« …près de 20 000 soldats, de 1990 à 1998, pendant leur premier déploiement au Libéria…par la suite en Sierra Leone (1997-2000), en Guinée-Bissau (1998-1999 et 2012), de nouveau au Libéria (2003) et en Côte d’Ivoire (2003-2004)…Puis ce fut la force en attente de la CEDEAO (FAC) en 2004. » (Rémi CARLIER). Et « dans la configuration actuelle, chaque pays membre doit pouvoir mettre à disposition de la Force une
brigade d’environ 500 soldats et officiers formés aux opérations de maintien de la paix, des policiers et du personnel civil. Parmi eux, une «force d’intervention rapide » mobilisable sous 30 jours. Plusieurs scénarios de crise sont élaborés par l’état-major. « Suivant la crise, on adapte le nombre de soldats à envoyer » », explique le général Coulibaly du Mali qui
commandait la force. 
Ce regroupement et mobilisation certes salutaire n’en cache pas moins des défaillances de taille. En effet lors de l’attaque contre le Mali, cette force dite en entente a montré des lenteurs qui allaient permettre le pire. Les moyens nécessaires (humains, matériels, et surtout financiers) n’ont pu être obtenus à temps. Et en Sierra Léone environ 500 de ses hommes ont
été pris en otages, libérés grâce à une intervention britannique ce qui souligne des insuffisances technico-tactiques mais matérielles injustifiables par rapport à une coalition sous régionale. Ces insuffisances sont d’autant plus visibles que souvent il est demandé aux nations unies de prendre la relève. Les failles sont aussi tangibles avec la nécessité d’un engagement
étranger comme vu pour le cas Sierra Léonais avec l’Angleterre et plus récemment le cas malien avec l’opération Serval française qui a coupé la progression des jihadistes. Cependant, la France déclare depuis belles lurettes ne plus vouloir engager ses hommes sur les théâtres
d’opérations africaines mais opter pour un soutien technique, matériel, financier…Un souhait qui semble irréalisable en l’état des choses d’où on a connu les interventions françaises jusque dans cette dernière décennie : Les derniers exemples en date sont les opérations de l’Union Européenne (UE) en République Démocratique du Congo (Artémis)   ; l’opération Licorne en
Côte d’Ivoire ; l’interposition en République Centrafricaine, l’intervention au Mali.  Et quoiqu’on puisse en dire sur leurs motivations profondes, ces interventions ont circonscrit les bains de sang : «Hormis les considérations économiques et de domination politique, les interventions militaires françaises qui se sont succédées au Cameroun, au Tchad, en Centrafrique , aux Comores, au Zaïre/Congo Démocratique ou en Côte d’ivoire, ont porté
leurs fruits en ce que, des vies humaines sont préservées, et les conflits internes qui allaient prendre l’allure d’une guerre civile à grande échelle se sont estompés.» (Simplice FEIKOUMO). En dehors de la France, l’Angleterre est aussi présente d’une façon similaire aux cotés de ses anciennes colonies, les Etats unis longtemps stationnés sur la corne de l’Afrique se sont
multipliés après les attaques du 11 septembre et le glissement de l’Etat islamique (EI) vers l’Afrique avec ses forces spéciales au Sahara notamment. L’analyste Leslie Varenne avance dans ce sens que l’Afrique de l’Ouest est dans l’œil du cyclone US avec la mort de soldats américains au Niger mais aussi avec le pivotement de l’Etat islamique (EI) vers le Sahara
comme le corrobore le chef d’Etat major américain, le Gl Dunford : «La guerre est en train de se déplacer. Je ne suis pas sûr qu’on puisse dire qu’elle se déplace en Afrique seulement. Nous sommes confrontés à un défi qui s’étend de l’Afrique de l’Ouest à l’Asie du Sud Est.». La chine
et la Russie font montre d’un intérêt et se signalent respectivement au Mali et en Egypte.
L’Allemagne aussi est de plus en plus présente dans la coopération militaire. Sans compter avec les puissances du golfe qui se jaugent entre Tombouctou et la Libye.
Tout ceci fait de l’Afrique un continent potentiellement dépossédé de son territoire et de sa souveraineté si elle n’y prend garde. Surtout que de nos jours, la nébuleuse internationale du jihadisme prend ses marques en causant d’ores et déjà des coups plus crapuleux les uns que
les autres à travers tout le continent africain, avec des groupuscules diversement structurés et outillés. Boko haram qui déborde le Nigéria, les nombreux groupes multinationaux terroristes dans le sahel, l’Etat islamique au Maghreb notamment en Libye, vers l’Est au tour de la
Somalie regorge de nombreux groupes terroristes farfelus comme les shebab…Mais nous de l’Ouest notre première préoccupation est la connexion terroriste au sahel qui tend à atteindre les cotes avec comme base arrière le Sahara. Impacté le président du Faso, président en
exercice du G5 Sahel, Roch Marc Christian Kaboré a déclaré qu’«au cours des six derniers mois, les conséquences des attaques terroristes ont atteint un niveau très alarmant». Nous sommes tous de potentielles cibles : «les menaces directes ou indirectes transcendent les frontières» (Kaboré). Le jihadisme cherche a attiser toutes les mésententes ( Au Mali et en
Burkina, les peulhs sont indexés comme étant de mèche avec les jihadistes d’où des massacres à leur encontre), dévier les gouvernants des priorités de développement, accentuer les périls comme en témoigne les propos du président Kaboré : «l’escalade de la violence et de l’insécurité ont déclenché une crise humanitaire sans précédent, faisant plusieurs millions de
déplacés internes, de nombreuses victimes militaires et civiles, des écoles et infrastructures de santé fermées et des symboles de l’Etat détruits». Ce péril a d’ailleurs ameuté l’opinion internationale d’où Emmanuel Macron parle de «l’expansion du phénomène terroriste au Sahel ». C’est ainsi qu’au cours du dernier G7 de Biarritz, il a été annoncé la création d’un « partenariat pour la sécurité et la stabilité pour le Sahel ». Aussi, les dirigeants de l’ouest

africain réunis au sein de la CEDEAO à Ouagadougou ont annoncé la mobilisation d’un milliard de dollar pour freiner l’hécatombe. Et c’est cette démarche d’ensemble qui doit être la règle avec des mécanismes permanents de réaction rapide voire préventive. Et en cela, le
fédéralisme menant à la sollicitude collective à l’endroit de tous les démembrements de la collectivité; quel meilleur champ d’exercice du fédéralisme que l’Afrique? Continent où l’histoire s’est acharnée et a laissé des séquelles encore visibles et unificatrices! Continent où des groupuscules de tous genres et pour n’importe quel motif, prennent en otage des peuples
entre des feux nourris, sans craindre de représailles conséquentes! Surtout que, l’histoire avec les empires du Soudan (2500 avant JC), du Ghana (770 après JC), du Mali vers 1235, montre notre fédéralisme passé. Et qu’au global, la bonne fortune et les formes actuelles d’entités fédérales (UE, USA…), dans un monde de coalitions d’intérêt et des intérêts font notre
motivation.
En somme, pendant longtemps, en Afrique, on a fait avec des regroupements militaires sous régionaux particulièrement en Afrique de l’Ouest. Et aujourd’hui, avec le consensus sur la nécessité de perfectionner et étendre l’expérience une base de la force africaine en attente (FAA) a été ouverte au Cameroun à Douala, un site inauguré vendredi 5 janvier 2017. Cela après quinze années d’attente depuis son annonce par l’UA. Mais aussi un déclic motivé par le terrorisme semble en cours : « Officiellement, il n’ ya pas encore une Armée Africaine.
Mais sur le terrain, sur le théâtre des opérations, une Armée Africaine commence à prendre forme dans les différentes régions géographiques du continent.» (Moussa Seck, IPS). Ceci est corroboré par le président Idriss déby Itno dont le pays consent de grands sacrifices à la sécurité collective : « Le panafricanisme longtemps prêché par les dignes fils de l’Afrique est
maintenant relayé par des actes concrets.» Et le colonel Adjie d’apporter une précision sur cette nouvelle dynamique : « La FAA n’est pas une force stationnée prête à l’emploi, mais elle se compose de contingents de différents États, formés pour des missions communes et pouvant être
déployés rapidement sur préavis et avec un mandat de l’Union africaine ou des Nations-Unies.
Les cinq régions du continent (Afrique australe, de l’Est, du Nord, de l’Ouest et centrale) constituent chacune une brigade en attente.» Ce pas timide est à consolider en faisant de la base de Douala le quartier général (QG) des forces armées africaines. En effet, à travers nos attachés militaires des ambassades africaines au Cameroun nous pouvons établir une cellule
de coordination. Devenue un lieu de représentation militaire de tous les Etats de l’UA, la base de Douala pourra coordonner des manœuvres sous régionales et continentales intégrées dans l’agenda de nos armées sur la base des scénarios dictés par le contexte sous régional et continental. Cette force africaine en attente sera opérationnelle, extensible et en mesure d’être déployée partout où besoin sera, à condition que nos Etats fassent une évaluation et intégration des potentiels militaires (terrestres, navales, aériens…) par pays, par sous régions, à travers tout le continent d’où nous serons prêts pour faire face à tous les défis sécuritaires qui nous interpellent. Comme dit l’adage qui veut la paix prépare la guerre. Des forces armées d’Afrique à l’armée africaine, c’est maintenant!(Siré Sy, IPS)

P B Moussa Kane,

Doctorant en Aménagement-développement et DEA science PO, UGB
Responsable commission scientifique du mouvement des étudiants panafricains de St-Louis(MEPUS)

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