Quand ils étaient communistes, les laudateurs actuels de la collaboration de classe et de la lutte des places dans les gouvernements bourgeois néocoloniaux dénonçaient fort justement l’oppression néocoloniale et la servilité de la bourgeoisie bureaucratique aux impérialismes françafricains, eurafricains et usafricains.
La gauche communiste se définissait elle-même comme anti-impérialiste donc patriotique dans le but d’élever la conscience patriotique et révolutionnaire des classes laborieuses et du peuple. Ils démasquaient et excluaient le PS de la « gauche », c’est-à-dire la social-démocratie devenue social-libéral (socialiste en parole et libéral en fait) par sa soumission aux diktats libéraux du FMI, de la BM, de l’OMC.
La social-démocratie des métropoles impérialistes s’était, dès 1914 lors de la première guerre mondiale, érigée en « gauche » du capital en appelant les ouvriers et les classes laborieuses à soutenir leurs bourgeoisies impérialistes contre leurs rivaux colonialistes des autres pays capitalistes impérialistes tout en soutenant la « mission civilisatrice » du colonialisme qu’il fallait « humaniser ».
« Poilus » et « tirailleurs » furent des chairs à canons qui faisaient la guerre pour les profits des capitalistes impérialistes. Le social libéralisme, c’est-à-dire le ralliement de la social-démocratie au libéralisme est devenu la marque de fabrique politique des PS/Ecolos au pouvoir dans les pays impérialistes pour entamer la destruction en cours des conquêtes sociales et démocratiques au centre du capitalisme impérialiste.
La conversion au néocolonialisme de la gauche communiste
La gauche communiste dans nos pays colonisés et néo-colonisés luttaient contre la social-démocratie, la droite et l’extrême droite fasciste souvent militariste, contre les libéraux et sociaux libéraux sénégalais et africains. Comme le rappelle souvent le doyen Alla Kane, la gauche communiste historique fut la seule force à avoir vraiment lutté contre les « accords de coopération » qui nous ont enfermé dans la prison de la dépendance néocoloniale. L’ex-gauche communiste savait donc, comme le dit le géant communiste africain Amilcar Cabral, que « Nos ennemis sont fermement déterminés à nous donner des coups mortels et à transformer nos victoires en échecs. Ils savent, pour atteindre ce but, utiliser l’instrument le plus propice : les traîtres africains. Voilà une vérité rendue plus évidente par notre lutte : malgré les forces armées, les impérialistes ne peuvent pas se passer des traîtres. Chefs traditionnels et bandits pendant l’esclavage et les guerres de conquête coloniale; gendarmes, divers agents et soldats mercenaires durant l’âge d’or du colonialisme; soi-disant chefs d’État et ministres à l’époque du néocolonialisme. Les ennemis des peuples africains sont puissants et rusés et peuvent toujours disposer de laquais fidèles chez nous, car les Quisling ne sont pas un privilège de l’Europe » parce que le néocolonialisme, c’est la « continuation de la domination économique impérialiste déguisée par une direction politique autochtone ».
Malgré cet enseignement révolutionnaire, des dirigeants de l’ex-gauche communiste au Sénégal, ainsi que dans les autres néo-colonies du pré-carré françafricain, se sont convertis en collaborateurs associés aux gouvernements successifs de la bourgeoisie bureaucratique néo-coloniale en trahissant les classes laborieuses et le peuple pour se mettre en position de subalternes dans des gouvernements libéraux et sociaux-libéraux au service de la domination impérialiste.
Certains ont été littéralement happés par le tournis de « la crise de l’âge mûr » selon l’expression de notre camarade feu Assane Samb. Ils ont abandonné, par impatience, la stratégie léniniste de l’organisation patiente du “siège en règle de la forteresse ennemie” qui prépare le saut qualitatif révolutionnaire consécutif à l’accumulation quantitative du travail communiste au sein des classes laborieuses. Ils se sont lancés à corps perdu dans le marais nauséabond du partage des sinécures et autres portefeuilles ministériels, de pdg, de dg d’agences mangeoires, de CA d’organes budgétivores.
Les dirigeants les plus en vue de l’ex-gauche communiste ont été ainsi intégrés dans le processus d’enrichissement illicite de bourgeoisies compradores par les gouvernements néocoloniaux successifs des libéraux et sociaux libéraux. Terrible et pathétique tragédie comique d’avoir ainsi confirmé les vantardises corruptrices du ‘’père’’ du libéralisme, l’ex-président A. Wade parlant de ses alliés du PIT, de la LD et de And-Jëff : « Pour moi, c’était des gens qui jouaient un jeu, l’histoire avait fait qu’ils avaient basculé dans un camp qui les soutenait. Ceux qui recevaient des subsides de Moscou, il fallait qu’ils jouent les communistes, comme ceux qui recevaient des armes aussi » (Chronique d’une Alternance – Malick Diagne – p.64 – édition Xamal-juillet 2000).
Heureusement que cet opportunisme qui a gangrené l’ex-gauche communiste a aussi nécessairement fécondé en son sein des résistances et des démarcations de la part de ceux et celles qui refusaient le reniement et la trahison comme pied de nez à la moquerie libérale.
Le patriotisme et le panafricanisme sont une partie de l’ADN du communisme africain
Notre premier ADN est la classe ouvrière, le prolétariat, les classes laborieuses. Le second dans les colonies et néo-colonies est le patriotisme conséquent.
Et pourtant, reniant, toute honte bue, leur engagement révolutionnaire du passé, les voilà qui s’embourbent, comme le dit le camarade Madieye Mbodj, membre du BP de PASTEF, Vice-président chargé de la vie politique nationale, dans « un procès en sorcellerie contre l’opposition patriotique qualifiée de ‘’populiste, manipulatrice, émeutière, pyromane, terroriste, djihadiste, anarcho-subversive, fasciste’’ ». A la manière de l’autruche la tête dans le sable, ils Pensent sans doute que l’outrance de la vulgarité mensongère contre l’opposition patriotique masquerait la réalité des atteintes liberticides de leur association servile à un pouvoir libéral néocolonial fascisant qui piétine tous les jours la Constitution et les lois, bafoue tous les principes démocratiques du contrat national édictés par les Assises Nationales dont ils sont tous, par ailleurs, signataires.
Ces insultes malveillantes expriment leur peur atavique de la fin de règne du pouvoir de la seconde alternance libérale et donc des travaux pratiques actuels de la collaboration de classe et de la lutte des places dans les gouvernements libéraux néocoloniaux. Aux abois, nos ex-gauches communistes cherchent vainement à faire prendre des vessies pour des lanternes, s’évertuent à brouiller les pistes et, avec un aplomb cynique, à faire semblant de se donner bonne conscience croyant ainsi tromper le peuple qui ne les écoute plus et leur voue un dégoût justifié. Sont-ils pris du vertige enivrant de l’argent sale pour prendre les Sénégalais pour des demeurés qui regardent le doigt et non la lune qu’il désigne ?
L’ex-gauche communiste a largement rendu irréversible l’auto-enterrement de son cortège funèbre en cherchant en plus à réhabiliter la prétendue « gauche » socialiste qui a régné 40 ans durant après avoir interdit et dissout le seul véritable parti indépendantiste d’alors, le PAI marxiste-léniniste, réprimé nos nombreux martyrs communistes révolutionnaires et fait éclater la première expérience panafricaine, la Fédération du Mali,.
L’ex-gauche communiste avait bâti ses heures de gloire en combinant la lutte pour l’avènement des ouvriers, paysans, éleveurs, pêcheurs, artisans et travailleurs de l’informel en force politique indépendante des bourgeoisies néocoloniales et la lutte pour l’indépendance et la souveraineté nationales. Lutter pour que les classes laborieuses disputent l’hégémonie dans le mouvement de libération nationale aux bourgeoisies locales, principalement celles qui ont choisi la voie de se soumettre à la mutation du colonialisme en néocolonialisme.
Ce faisant, au-delà des divergences idéologiques d’alors entre PAI, PIT, LD, AJ et Ferñent, il s’agissait de décliner l’enseignement suivant au plan sénégalais et africain en tenant compte de l’étape libératrice que chacun formulait à sa manière comme devant être la Révolution Nationale Démocratique, Populaire, Anti-Impérialiste : « Les ouvriers n’ont pas de patrie. On ne peut pas leur ôter ce qu’ils n’ont pas. Sans doute le prolétariat doit tout d’abord conquérir le pouvoir politique, s’ériger en classe nationale souveraine, et se constituer lui-même en nation, et en ce sens il est encore attaché à une nationalité. Mais il ne l’est plus au sens de la bourgeoisie » (Le manifeste du parti communiste, Marx et Engels).
Cet enseignement a été dévoyé par le révisionnisme opportuniste en Occident impérialiste par l’érection d’une muraille de Chine infranchissable entre internationalisme et patriotisme qui a caractérisé un des courants gauchiste de la social-démocratie qu’est le trotskisme.
Or tous les dirigeants communistes, qui ont infligé des défaites majeures au capitalisme impérialiste en Occident impérialiste, de Marx/Engels à Lénine/Staline et autres, ont mis en œuvre avec pertinence la double besogne communiste du prolétariat et des classes laborieuses : « conquérir le pouvoir politique, s’ériger en classe nationale souveraine et se constituer en nation sans l’être au sens bourgeois ». Cet enseignement a été aussi matérialisé par les pouvoirs communistes en Chine populaire, au Vietnam, en Corée du Nord et à Cuba, voire même en Inde au Kerala dirigé par les communistes. Cet enseignement cherche à se frayer un chemin en Amérique du sud, au Venezuela, au Nicaragua, en Bolivie, au Chili, au Pérou, en Colombie et au Brésil, etc.
Cette double besogne qui associe internationalisme, c’est-à-dire les classes laborieuses n’ont pas de patrie au sens des intérêts de classe et patriotisme, c’est-à-dire la libération et la souveraineté nationales, est encore plus pertinente dans les luttes anti-coloniales et anti-néocoloniales en Afrique, étape vers le panafricanisme des classes laborieuses et des peuples que chante avec tant de vigueur le doyen communiste marxiste-léniniste Jo Diop.
Les classes sociales, le patriotisme et le panafricanisme
Patriotisme et panafricanisme ne sont l’apanage exclusif d’aucune classe sociale. Chaque classe sociale a son propre patriotisme et panafricanisme.
Le « panafricanisme » des impérialistes sous la forme, par exemple, de l’AOF, de l’AEF, de la zone CFA/UEMOA, des APE est colonialiste et néocolonialiste, en ce sens qu’il s’agit d’un panafricanisme au service du monopole colonial et néocolonial françafricain, eurafricain et usafricain.
Celui de l’actuelle ZLEC des bourgeoisies africaines de l’UA ou de la CEDEAO est une réponse libérale panafricaine à l’intégration dans la mondialisation impérialiste dominée par l’impérialisme US.
Alors que les projets patriotiques panafricains de l’opposition militante multiforme et protéiforme recoupent ceux des différentes classes sociales africaines dans chaque pays africain qu’il s’agisse des féodaux, des bourgeoisies nationalistes, néocoloniales ou des classes laborieuses.
Lors de la première phase de libération nationale africaine, toutes les classes sociales engagées dans la lutte pour arracher l’indépendance nationale s’étaient alliées, dans un premier temps, dans des partis-fronts à l’instar du Rassemblement Démocratique Africain (RDA) pour prendre en charge la lutte patriotique et panafricaine anti-coloniale. C’est ainsi que dans le RDA, on retrouvait les bourgeois comme le planteur agrarien Houphouët Boigny, les syndicalistes Sékou Touré, Ruben Um Nyobé, les enseignants Modibo Keita, Djibo Bakary, Victor Diatta, etc. C’est la trahison d’une partie de l’intelligentsia petite bourgeoise et des bourgeoisies apatrides qui a conduit à la création du PAI en tant que parti marxiste-léniniste indépendantiste des classes laborieuses.
La tendance actuelle de la seconde phase de libération nationale en Afrique, dans un contexte d’affrontement de plus en plus ouvert entre unilatéralisme hégémonique de l’Occident impérialiste sous direction US et multilatéralisme porté par les bourgeoisies nationales émergentes (Russie, Inde, Brésil, etc) et les rescapés du camp socialistes (Chine, Vietnam, Corée du Nord, Cuba), remet à l’ordre du jour des formes d’alliances tactiques dans chaque pays africain entre patriotisme et panafricanisme de certains secteurs de la bourgeoisie, de l’intelligentsia petite bourgeoise nationale et des classes laborieuses qui ont subi un recul idéologique à cause de la trahison des dirigeants de l’ex-gauche communiste.
Le parti-front qu’est PASTEF est en réalité l’alliance entre toutes les fractions et classes sociales souverainistes du pays pour frayer la voie à l’alternative patriotique et panafricaine contre le néocolonialisme qui perdure depuis les années 60.
Cette alliance patriotique et panafricaine est dominée par l’intelligentsia petite bourgeoise dont la politisation s’opère à travers la dénonciation de la corruption, du népotisme, de la gabegie, de la patrimonialisation du pouvoir politique et économique, de la mal-gouvernance, de la servilité néocoloniale au profit des impérialistes et des diktats culturalistes néocoloniaux prétendument « civilisateurs » de l’Occident impérialiste. Cette politisation de la jeunesse patriotique s’opère aussi par le rejet justifié des traîtres de l’ex-gauche communiste.
C’est pourquoi il est important que les vrais communistes dévoilent la tromperie de l’image fausse que donne à la rébellion patriotique et au peuple l’aplatissement des renégats de l’ex-gauche communiste sur ce qu’est vraiment le communisme et ce qu’il a apporté aux luttes des classes laborieuses et du peuple au Sénégal et en Afrique.
Pour marcher résolument vers la libération nationale dans cette seconde phase libératrice, la fusion dans PASTEF des résistants de l’ex-gauche communiste constitue la jambe droite rassemblant l’alliance des classes anti-néocoloniales qui forment le camp patriotique et panafricain.
Pour comprendre cette nécessité, il suffit de jeter un coup d’œil en arrière vers l’expérience du RDA à ses débuts à laquelle la trahison de l’ex-gauche communiste nous reconduit.
Rappelons que dès août 1994, dans notre journal communiste Ferñent, nous projetions consécutivement à la défaite du camp socialiste d’Europe et à la restauration du capitalisme en URSS qu’ « Il est probable que l’attentisme, le manque de confiance et l’hésitation vont caractériser notre classe ouvrière pendant un temps plus ou moins long. Les éléments les plus politiques ont été directement ou indirectement dans le giron des révisionnistes et des opportunistes traîtres. Le socialisme a été symbolisé par les partis révisionnistes. Et l’hypothétique « voie africaine du panafricanisme » sans contenu de classe est une voie de garage « qu ‘expérimentent » certains. Alors, il faudra que les ouvriers avancés digèrent les déconvenues suscitées par la trahison et la faillite complète du réformisme et du révisionnisme avant qu’ils ne puissent, à une vaste échelle, retrouver le chemin de la lutte pour la constitution de la classe ouvrière en force politique indépendante dans notre pays ». La vie a vérifié et confirmé la justesse de cette analyse prospective.
C’est pourquoi, nous autres communistes devons ne jamais oublier la jambe gauche, celle du réarmement idéologique et politique des classes laborieuses pour « l’ériger en classe souveraine » afin d’éviter que ne se réitère la trahison du RDA qui a produit le passage du colonialisme au néo-colonialisme et la trahison de l’ex-gauche communiste dont l’antidote, heureusement, est l’émergence politique culturellement hégémonique du patriotisme d’une jeunesse rebelle qui refuse d’être condamnée à la misère du non-développement pendant que les gouvernants se mettent des milliards dans la poche et à la mort lors des traversées du désert, des mers et pour ceux et celles qui arrivent dans les soi-disant « eldorado européen et étasunien » d’y subir le racisme d’État et le fascisme.
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