Hommage à l’excellent Professeur Amadou Makhtar Mbow

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Le Sénégal perd un monument ce 24 septembre 2024. Amadou Mahtar M’Bow nous a quittés. Né le 20 mars 1921 à Dakar, il restera à jamais comme l’un des plus grands intellectuels du Sénégal et de l’Afrique. Historien de renom et homme d’Etat de premier plan, il a marqué l’histoire intellectuelle et politique du monde par ses immenses qualités humaines et professionnelles. Son curriculum vitae, que l’hebdomadaire Jeune Afrique considère comme « kilométrique », enseigne sur la richesse de la carrière de l’ancien Directeur général de l’UNESCO (1974-1987). Selon Federico Mayor, qui fut son successeur à l’UNESCO, Amadou Mahtar M’Bow est « un grand Monsieur de ce monde ».
Après avoir fréquenté l’école coranique à Louga où il a grandi, Amadou Mahtar M’Bow entame un riche cursus scolaire avec l’appui de Blaise Diagne. A l’âge de sa majorité et dans un contexte politique marqué par l’occupation coloniale française et le déclenchement de la Seconde Guerre, il s’engage dans l’Armée de l’air française et participe à la lutte contre l’Allemagne nazie de 1940 à 1945.
Après avoir fait des études dans l’aéronautique, M’Bow obtient à la Sorbone, à Paris, une licence ès-lettres. Très engagé et très actif dans le combat pour l’affirmation des Africains en France, il a été le Président de l’Association des Etudiants de Paris et le fondateur, en 1950, de la Fédération des Etudiants d’Afrique noire en France (FEANF) dont il fut le premier Secrétaire général avec comme adjoint N’Ki Traoré de la Guinée Conakry et comme trésorier Abdoul Moumouni du Niger. La FEANF était à la fois un mouvement syndical étudiant et un instrument de lutte pour l’indépendance.
Grand serviteur de la cause des étudiants africains en France, M’Bow a ensuite, en tant que fonctionnaire, rendu de loyaux services à l’Administration. Il a d’abord enseigné au collègue de Rosso Mauritanie (1951 à 1953) avant de créer le Service de l’Éducation de Base au Sénégal. Chef des Missions d’éducation de Base dans plusieurs localités (Darou Mousty, Badiana, Sénoudébou, Gaya) et éminent professeur d’Histoire et de Géographie jusqu’en 1966, il a enseigné au lycée Faidherbe de Saint-Louis et à l’École normale supérieure de Dakar (aujourd’hui FASTEF). Dans le cadre de la réforme des programmes d’Histoire et de Géographie, il a joué un grand rôle de catalyseur.
Amadou Mahtar M’Bow a été ministre de l’Éducation et de la Culture du Sénégal pendant la période d’autonomie interne (1957-1958), ministre de l’Éducation nationale (1966-1968), ministre de la Culture et de la Jeunesse (1968-1970). Sa carrière en tant qu’élu le conduit aux postes de député à l’Assemblée nationale et de conseiller municipal à Saint-Louis.
M’Bow a présidé les Assises nationales du Sénégal lancées par le Front Siggil Senegaal qui ont réuni pendant près d’un an (entre 2008 et 2009) les principaux partis d’opposition au pouvoir du président Abdoulaye Wade et des dizaines d’organisations diverses. Il a fait aussi une brillante carrière à l’UNESCO où il fit d’abord sous-directeur général, puis Directeur général de 1974 à 1987. Il est la seconde personnalité d’un pays du tiers monde, après le Mexicain Jaime Torres Bodet, à occuper ce poste et donc le premier Africain et à être à la tête d’une des plus prestigieuses organisations des Nations unies. Revenant sur le départ de M’Bow de l’UNESCO, Arnaud Jouve de Radio France internationale (RFI) raconte : « Le jour de son départ de l’Unesco, l’hommage de tous les États membres sera unanime pour saluer la qualité du travail accompli, y compris ceux des pays qui ont quitté l’organisation à cette époque et qui ont voulu témoigner de leur grande estime à l’égard de cet homme remarquable. » Jouve considère que le Professeur M’Bow aura traversé son époque avec dignité et grandeur, en portant au plus haut les droits et les valeurs culturels de ceux que l’on réduisait alors au tiers-monde.
M’bow a publié de nombreux ouvrages, de nombreux manuels sur la renaissance de l’Afrique, sur sa philosophie d’un Nouvel ordre mondial de l’information et de la communication. La nouvelle université de Dakar à Diamniadio, qui porte le nom d’Amadou-Mahtar M’Bow, constitue, selon le quotidien national Le Soleil en date du 15 mars 2015, un « hommage, et de son vivant, à un homme qui le mérite très amplement » et qui rappelle les « services rendus à plusieurs reprises à la nation, mais aussi à l’Afrique, au tiers monde et à toute la communauté scientifique internationale. » Que dire de l’Association sénégalaise des Professeurs d’Histoire et de Géographie (ASPHG) qu’il a toujours aidé par sa générosité légendaire. L’ancien secrétaire général de l’ASPHG, Mamadou Koné et l’actuel secrétaire général Moustapha Sène ont joué un grand rôle dans la proximité féconde entre le Professeur M’Bow et l’Association.
C’est le Sénégal qui a perdu un digne fils qui a été professeur émérite, un ministre compétent, un parlementaire dévoué, un élu local de qualité qui a porté très haut le nom du Sénégal avec courage, pragmatisme et lucidité. La vie du Professeur Amadou Mahtar M’Bow doit être racontée aux générations actuelles car il fut un homme de valeur.
Repose en paix, Professeur !

Mamadou Moustapha FALL, Professeur, Secrétaire général adjoint de l’Association sénégalaise des Professeurs d’Histoire et de Géographie (ASPHG), Email : moustaphaby2000@yahoo.fr

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