Gel du prix des denrées au Sénégal : le veto du conflit ukrainien (Par Moustapha Diakhaté)

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La hausse généralisée des prix à la consommation partout dans le monde, vient perturber les programmes de relance économique post-Covid de tous les gouvernements. «L’inflation, cette hausse des prix qui terrorise les consommateurs«, apparaît partout. Ainsi, les principales économies du globe voient leurs indices des prix à la consommation grimper, à commencer par les Etats-Unis où le record de 1990 a été battu, avec des prix qui ont augmenté de plus de 6% sur un an, en Europe, l’inflation était à 2,2% en moyenne en 2021.

Et en Afrique, surtout dans la zone Uemoa, le taux d’inflation, en glissement annuel, s’est situé à plus de 3% en moyenne sur l’année 2021, donc plus que la croissance économique dans notre zone. Donc pas de richesse produite au Sénégal et en zone Uemoa depuis la survenue du Covid-19.

Dans des pays comme le Sénégal où le secteur industriel ne contribue qu’à hauteur de 15% en moyenne au produit intérieur brut, nous importons plus de 600 milliards de produits alimentaires chaque année, le même montant voire même plus, pour les importations de produits pétroliers bruts et raffinés. Ainsi, notre pays est d’une vulnérabilité extrême pour tout frémissement constaté sur le marché international des céréales, surtout pour le blé et le pétrole.

La crise qui s’est déclenchée dans l’ex-Union soviétique, avec l’invasion quasi imminente de l’Ukraine par la Russie, aura pour principales conséquences des hausses brusques sur le prix du blé -matière première de choix pour le pain- et surtout pour le pétrole et le gaz.

Le baril de pétrole dépasse aujourd’hui les 100 dollars. Les approvisionnements de ce produit stratégique et essentiel pourraient être perturbés, surtout pour l’Europe qui achète 40 % de son stock de gaz à la Russie. Aussi, la crise en Ukraine aura des conséquences directes sur la baguette de pain et la production d’engrais pour l’agriculture mondiale. En effet, l’Ukraine est le grenier à blé du monde.
Dans ce contexte, les mesures de gel du prix des denrées comme le riz, l’huile, et subsidiairement le sucre, prises par le gouvernement du Sénégal, sont certes salutaires, mais auront un impact très limité dans le temps, surtout avec le prix du carburant et des combustibles pétroliers et gaziers dont la corrélation avec les prix aux consommateurs est très forte.

En l’absence d’une production locale de riz et surtout d’une consommation de produits locaux, les consommateurs et automobilistes risquent de voir leurs pouvoirs d’achat encore affectés très négativement. Le tout dans un contexte de croissance économique réelle faible, voire négative au Sénégal et dans tout l’espace Uemoa.

L’actuel chef de l’Etat du Sénégal et président en exercice de l’Union africaine est rattrapé par des choix économiques contradictoires qui ne lui donnent plus de marge de manœuvre, sinon des slogans et effets d’annonce qui ne rassurent plus les masses de population qui sont déjà essoufflées par la pandémie et ses effets désastreux sur leur quotidien.

Le rêve d’une Russie de l’Atlantique à l’Oural du Président Russe met à nu le pilotage à vue des économies africaines désarticulées ; extraverties ; surendettées et sans aucun ancrage dans une économie mondiale industrialisée et innovante, qui ne rémunère plus correctement les matières premières brutes et produits de base que notre continent produit et exporte.

L’impératif d’une refondation de nos économies dans un continent de plus d’un milliard d’habitants, est plus qu’urgent. Voici le chantier titanesque du président en exercice de l’Union africaine. L’arrimage à l’Occident nous affaiblit et nous appauvrit. Voici mon cri du cœur.
Moustapha Diakhate
Expert et Consultant en Infrastructures
Ex Conseiller Spécial PM

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