En 2024 tout le monde aura déjà tout oublié… (Par Jean-Marie Biagui)

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Oublié définitivement – je l’espère tout au moins – la crise sanitaire du covid-19, pour ne retenir qu’une chose, savoir pour devoir y remédier à l’avenir que, tout au long de cette crise sanitaire, nous aurons manqué de « pédagogie de la mort », pour nous être plutôt enfermés, individuellement ou collectivement, dans la dissimulation de la véritable cause de la mort de ceux des nôtres emportés si cruellement par le covid-19 ; allant même quelquefois, dans ce jeu pervers de la dissimulation, jusqu’à commettre des actes hautement répréhensibles, à l’encontre notamment de journalistes qui n’auront fait en l’occurrence que leur job.

Or, le savoir et le verbaliser, eût été faire preuve d’une certaine « pédagogie de la mort ».

Aussi, souvenons-nous, ne fût-ce qu’à titre purement illustratif, quoiqu’osé, voire hasardeux, que nous autres Chrétiens savons de quoi notre Seigneur, Jésus, est mort ; et comment il est mort ; et ce, en dépit de ce qu’il est pour nous La Vie vainqueur de la mort. Et que savoir cela, participe d’une « pédagogie de la mort » certaine, une pédagogie faite liturgie.

Oublié, aussi, le coup-d’Etat-sans-violence au Mali, perpétré le 18 août 2020, qui s’annonçait puis se déroulait comme un « acte de salut public », en fait une opération de salubrité sociopolitique et morale, alors qu’une frange importante de la population, sans doute la majorité des Maliens, y verra, pour devoir le consacrer comme tel, l’acte salutaire ou salvateur par excellence visant à purger le Mali de son pus : la mal-gouvernance qui y prévalait jusqu’alors, la corruption, la gabegie, le clientélisme, le flirt avec tous les extrêmes et autres extrémismes et leurs extrémistes de tous poils (rien n’est cependant gagné quant à la lutte contre ce dernier fléau), etc.

Un coup d’Etat est toujours un acte d’intrusion par effraction dans l’administration ou le gouvernement d’un pays. Or, le vendredi 21 août 2020, place de l’Indépendance, très nombreux sont les Maliens qui iront célébrer, avec ferveur, aux côtés des putschistes, ce coup-d’Etat-sans-violence.

Oublié, encore, mais la liste n’est pas exhaustive, la crise (socio)politique prochaine, quoique déjà actuelle, en Guinée, puis en Côte-d’Ivoire, qui promet notamment des lendemains nécessairement obscurs, sinon cruels, avec respectivement la Présidentielle du 18 octobre 2020 pour un 3ème mandat indu du président Alpha Condé et celle prévue le 31 octobre 2020 pour un 3ème mandat tout aussi indu du président Alassane Dramane Ouattara.

Je préfère parler de 3ème mandat ‘‘indu’’, au lieu de ‘‘illégal’’ ou de ‘‘inconstitutionnel’’, si l’on sait que les Institutions compétentes dans ces deux pays, acquises qui plus est à la cause des présidents Condé et Ouattara, même dans leurs rêves les plus fous, une fois saisies de la question, ne feront rien, mais alors rien, qui ne corresponde à la stricte volonté de leurs mentors respectifs, comme jadis au Sénégal.

Entre-temps, l’idée prometteuse d’un 3ème mandat pour le président Macky Sall refera surface, immanquablement, et survolera tout le pays, voire au-delà. Tout le monde aura alors littéralement oublié les crises malienne puis guinéenne et ivoirienne.

Sauf que, ici, au Sénégal, la « jurisprudence Wade » fait et continuera de faire école, qui rappellera, à juste titre, à bon droit, que le président Abdoulaye Wade avait brigué indûment, mais légalement, un 3ème mandat en 2012.

Qui sait ce qui se serait passé si le président sortant d’alors s’était proclamé vainqueur à l’issue de cette Présidentielle ?

Concourir indûment, illégitimement, quoique légalement, au suffrage du Peuple pour quelque investiture indue, est par principe inacceptable, intolérable sous d’autres cieux ; mais, nous en avons eu la démonstration, acceptable et tolérable chez nous, au Sénégal.

Alors, en 2024, Macky « le veinard » – j’adore avec quelque soupçon de jalousie (rire !) le surnommer ainsi – pourra convoquer, tranquillement, et la fameuse « jurisprudence Wade », et les dispositions constitutionnelles concernées, pour justifier d’abord, et faire valider ensuite, sa candidature à sa propre succession. Pour le meilleur et pour le pire.

Et ça ne sera que justice, ou la rançon, c’est selon, quand en l’occurrence on n’a rien fait d’autre que de s’asseoir sur les principes ; et que, notamment, on n’a guère daigné achever « sa » révolution, en l’espèce « Le Mouvement du 23 juin 2011 », soit par manque de courage (on n’est jamais courageux que seul, comme on meurt seul, sachant au demeurant que c’est le courage cumulé de toutes et de tous qui fait la révolution, mais un courage qui ne faiblit ni ne fléchit point !), soit par pure commodité intellectuelle et politique douteuse.

Dakar, le 23 août 2020.

Jean-Marie François BIAGUI

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