Un grand homme d’Etat doit savoir quand il faut sortir de la peau du lion pour entrer dans celle du renard. Le fait d’assouplir sa ligne contre le régime de Macky Sall a orienté à la baisse le poids électoral de Idrissa Seck, mais ce dernier pourrait rebondir à la faveur d’un élargissement du dialogue à Ousmane Sonko, le chantre de l’opposition radicale.
Idrissa Seck est rompu à la « guérilla », pour avoir fait la prison en 1988, puis entre juillet 2005 et février 2006. Ce passé de combattant pouvait l’amener à durcir le ton contre le régime de Macky Sall au lendemain de la Présidentielle de 2019, lorsqu’il était dans la posture du chef de l’opposition (par défaut, Karim Wade et Khalifa Sall n’avaient pas concouru).
Mais l’ancien Premier ministre a préféré un réchauffement avec le pouvoir, justifiant son ralliement par la nécessité de soutenir l’action du gouvernement aux fins d’endiguer les contrecoups sociaux économiques pernicieux du coronavirus. Idy a de qui tenir : en intégrant le Gouvernement de majorité présidentielle élargie de Abdou Diouf dans les années 90, Me Abdoulaye Wade excipa de la nécessité d’aider le régime socialiste à atténuer les effets des ajustements structurels.
Mieux, à travers l’adoption d’un Code électoral consensuel en 1992, le pape du Sopi obtint la mise en place de conditions ayant favorisé la transparence dans l’organisation des élections et l’alternance démocratique du 19 mars 2000, sans « marcher sur des cadavres ». Pourtant, ailleurs dans la sous-région, on parlait «d’arc de tension géopolitique», avec les nombreuses guerres civiles comme ce fut au Libéria ou encore en Sierra Leone.
A rebours, une certaine opposition dite radicale profita de la situation de fébrilité causée par la vague pandémique pour tenter de fragiliser le pouvoir, en semblant ignorer qu’une telle attitude peut nourrir l’instabilité. Depuis lors, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts : non seulement Yewwi Askanwi s’est démembré, mais les divisions au sein de cette coalition risquent de faire l’affaire d’un candidat de Benno bokk yakaar qui pourrait ramasser les marrons du châtaignier.
Si la présidentielle se tient en février 2024, il y a de fortes chances qu’Amadou Ba passe devant Bassirou Diomaye Faye, s’il est vrai que les conditions de transparence ne sont pas garanties. La seule erreur qu’aurait commise Idrissa Seck en dialoguant serait de n’avoir pas exigé assez de garanties : il devait préalablement demander à Macky de renoncer à toute idée de 3e candidature.
Malheureusement, le « Ni oui, ni Non » du Président Sall sur cette question a renforcé la méfiance entre le pouvoir et le peuple. Lorsqu’en 2023, l’ancien maire de Thiès multiplia les déclarations contre une éventuelle candidature de Macky, ce fut un peu tard. Toutefois, dans les tout prochains jours, les planètes pourraient être alignées autrement avec les manœuvres pour la tenue d’un nouveau dialogue.
Si le chantre de l’opposition radicale, Ousmane Sonko, participe à un dialogue, le fait confortera Idrissa Seck dans sa posture de colombe. Mieux, ce serait pour l’ex-président du Conseil économique social et environnemental un tremplin à forts rebondissements pour tenter de s’imposer comme l’homme de la situation à la prochaine présidentielle, car la radicalité n’aura pas payé et il sera dans l’étoffe du candidat de la stabilité et de la cohésion nationale.
(Le Public)
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