Amadou Ba Premier ministre du Sénégal occupe-t-il entièrement son poste ? La réponse peut être négative si l’on sait que depuis sa nomination le 17 septembre 2022, il se montre discret, taciturne, ne fait aucune vague. Un profil…bas qui donne raison à ceux-là qui sont convaincus qu’il a du mal à jouer son véritable rôle dans un « gouvernement de combat » dont les objectifs ne sont peu clairement identifiables. Une option voulue ou imposée par un président de la République qui entretient le flou sur une candidature en 2024 ? Macky Sall semble mettre une croix sur les raisons qui l’avaient poussé à faire revenir le poste de Premier ministre (le 10 décembre 2021) supprimé après sa victoire au premier tour de la présidentielle de 2019. Le président de l’Union Africaine (UA) comptait prendre « à bras-le-corps » un mandat qui devrait lui « prendre beaucoup de temps », comme il le confiait à France 24.
« Avec toutes ces crises annoncées, je ne pourrai pas m’occuper au quotidien du Sénégal. Or le Sénégal, il faut s’en occuper au quotidien», laissait entendre le chef de l’État. Mais le temps anormalement long, pris pour choisir un Pm laissait entrevoir un changement de perspective. Les résultats des élections locales avec des déconvenues notées dans le camp présidentiel au niveau de certaines localités stratégiques comme Dakar, Thiès, Ziguinchor, Kaolack, ne sont pas étrangers à cette « lente précipitation ». Il fallait donc attendre les législatives du 31 juillet 2022 pour trouver le nom de celui qui devait renfiler le costume de Pm. Bâ qui a été convoqué « à la dernière minute », selon ses propres explications servies au Palais le jour de sa nomination, est certainement conscient qu’il revient…de loin. Ministre de l’Économie et des Finances de septembre 2013 à avril 2019 soit cinq ans durant, il a été « migré » au ministère des Affaires étrangères pour six mois avant d’être défenestré le 1 er novembre lors de la formation du gouvernement marquée par l’entrée des ministres de Rewmi après le ralliement d’Idrissa Seck. Une traversée du désert de presque deux ans gérée de « façon diplomatique ».
Stoïcisme et calculs…
L’une des particularités d’Amadou Ba est cette capacité de savoir « souffrir et de manœuvrer en silence », de ne laisser rien transparaître, un flegme utile dans une jungle politique loin d’être linéaire. Le Pm « joue le jeu » en se « faisant tout petit ». Son mentor ne lui offre, pour le moment, aucune chance d’être sous les lumières. Sall gère le « pays au quotidien ». Les principales mesures prises depuis le retour de la primature à l’image de la baisse des prix de certaines denrées portent d’abord sa signature. Son ministre du Commerce par ailleurs porte-parole du gouvernement se charge de la communication et du « service après vente ». Le Pm n’inaugure même pas les chrysanthèmes. Il assure les seconds rôles et se veut manifestement stoïque. Ce style, c’est l’homme Amadou Ba, un mélange de persévérance et de petits calculs dans la lecture d’une situation politique loin d’être linéaire. En attendant son heure ? Le moment idéal ?
Le 17 novembre dernier , le quotidien Bés Bi nous informait que deux mois après sa nomination, le Premier ministre n’avait ni bureau ni cabinet constitué. Un « collaborateur et proche » de Ba avait démenti… sans vraiment démentir. En s’exprimant sous le sceau de l’anonymat à Jeune Afrique, il cache mal une certaine gêne. Pour une information de cette envergure, les services de la Primature étaient plus habilités à apporter des éclairages à visage découvert. Le Premier ministre l’a sans doute voulu ainsi. Il montre vaille que vaille que tout se passe bien comme « dans Le meilleur des mondes possibles », qu’il se plaît au « Petit Palais » qui a « un avantage de taille, puisque le chef du gouvernement peut se rendre très vite au palais présidentiel en cas d’urgence sans être bloqué dans les embouteillages », pour reprendre ce collaborateur. Le camouflage lui va bien…jusqu’ici. Jusqu’à quand ?
MGN
Soyez le premier à commenter