À qui profite la croissance ? (Par Mamadou Lamine Diatta)

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La croissance du Pib reste un agrégat économique connu et apprécié des profanes même si elle reste encore énigmatique pour tout le monde.
Lorsque le gouvernement annonce en grande pompe une croissance projetée à 4,1% on se gargarise de monter sur le toit de l’Afrique d’autant que sur le continent pour l’exercice 2023,la moyenne oscille entre 3,3 et 4% de taux de croissance dans les 48 pays d’Afrique sub- saharienne.
Passée l’euphorie sur ces chiffres ronflants, place à la dure réalité du terrain.
Le panier de la ménagère sénégalaise n’est pas mieux garni qu’il y a dix ans car cette croissance chantée ici et là par les pouvoirs publics n’est pas du tout inclusive.
Alors à qui profite cette croissance projetée d’ailleurs à 8,3% à l’horizon 2024?
À l’analyse, il faut reconnaître que cette hausse de la production de richesses ne profite qu’à la téléphonie, aux trois cimenteries Sococim, Ciments du Sahel, Dangote( BTP) et aux industries contrôlées par l’investissement étranger notamment celles qui s’activent dans les mines( or, zircon et autres).
C’est donc dire que c’est le tertiaire ( services) et les mines qui tirent essentiellement cette croissance. Or, il s’agit de domaines quasiment contrôlés par l’investissement direct étranger.Autrement dit, en dehors du fait qu’ils représentent pour l’Etat une niche fiscale non négligeable,ces boosters de croissance profitent trop peu aux populations locales. Une vieille rengaine- revendication des croisés du développement endogène qui tarde à être matérialisée faute de vision prospective sérieusement planifiée par des dirigeants politiques peu inspirés dans la déclinaison et la mise en œuvre des politiques publiques.
Pourtant, point n’est besoin de sortir de HEC ou de London School of Economics ( LSE) pour savoir qu’une croissance doit être robuste, régulière et durable pour être inclusive et apporter un certain bien-être aux 18 millions de Sénégalais.
Mieux, il faut partir de paradigmes basiques pouvant déboucher sur la souveraineté alimentaire, la souveraineté énergétique et celle liée à la santé.
Donc démarrer le développement pour un pays pauvre très endetté ( Ppte) c’est avant tout partir d’un postulat sur une stratégie bien pensée visant à booster le secteur primaire.
Pour le moment l’agriculture ne pèse que pour 16% de la croissance.Assez faible pour que les Sénégalais profitent à volonté de cette croissance serinée à tout bout de champ.
Les recettes pour disposer d’une croissance assez inclusive sont connues mais c’est comme si les dirigeants africains ont les mains liées dans leur compagnonnage forcé ? avec les institutions de Bretton Woods notamment le fonds monétaire international ( Fmi).
Il ne faut surtout pas se voiler la face, le Fmi ne fera jamais du développement en Afrique ; il s’agit plutôt d’une institution financière qui ne s’intéresse pratiquement qu’aux mécanismes et autres remèdes de cheval liés notamment aux restrictions sur les subventions.C’est d’ailleurs ce qui explique quelque part la récente baisse drastique sur les subventions de l’électricité.Resultat, une hausse déguisée et maquillée des prix du courant électrique appliquée par une Senelec dont le Top Management se complique la tâche au quotidien avec des explications techniques alambiquées qui n’ont convaincu aucun consommateur.
Pis, le Fmi ne s’intéresse qu’au remboursement de la dette due par les pauvres pays africains.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle tout est mis en œuvre pour mettre en exergue et promouvoir toujours les cultures de rente ( café, cacao, arachide…) afin de permettre aux Africains de rembourser cette fameuse dette qui nous empêche quelque part de décoller compte non tenu d’une gouvernance peu orthodoxe de nos maigres ressources publiques et d’un train de vie démentiel des États africains.
Tout est lié !

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