La peur nous étreint. C’est la panique partout. Il est des heures de doute. C’est humain. Il est des moments de tristesse. Lorsqu’un être cher part. Surtout qu’on sait qu’il ne va jamais revenir.
C’est en ces instants où la douleur, inconsolable, te frappe dans le ventre comme un coup de poing, que tu réalises la fragilité qui est le propre de l’humain. Parce que seul l’humain a conscience de sa vulnérabilité. Seul lui sait que la mort est le sentiment suprême de la vacuité. Elle viole même la pudeur car elle est indifférente à la larme qui coule. Descend et disparaît sur la surface contrastée du visage. La mort est aveugle, non pas qu’elle ne voit pas. Mais juste qu’elle ne propose aucune autre réalité que le néant. La béance plonge finalement dans le désespoir. Ce sentiment d’impuissance, ce sentiment que rien n’est là pour sauver, ce sentiment-là nous fige dans la confusion et l’idée de perte.
La crise que le Covid19 nous impose n’est pas une crise ordinaire. Elle n’est pas comme la crise née des grandes épidémies qui ont traversé l’histoire. Elle est une crise particulière. Elle est humaine, existentielle, ontologique car elle touche à notre condition d’être. Elle nous touche aussi près aussi loin parce que nous sommes un seul monde, aussi près des Italiens qui meurent que des Espagnols ébahis, des Dakarois inquiets que des New Yorkais de la mémoire des tours en feu, des Parisiens confinés que des Iraniens désemparés, des Sud Africains effrayés que des Égyptiens pétrifiés. C’est que pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, l’histoire des uns est celle des autres. Rigoureusement. Radicalement. La mort qui rode. La mort qui trône, souveraine, impériale, imprévisible, bête. Son odeur nous confine, nous sépare, nous éloigne et nous rend si méfiants les uns envers les autres. Nous sommes dans le tremblement craintif. Dans le tressaillement compulsif. Nous sommes dans la déshérence parce que rien ne fait signe d’une lueur à venir.
Les aubes qui promettent sont pâles. La nuit s’éternise. Le ciel est éteint. La terre entière est à l’heure des annonces mortifères. Des morts, des milliers de morts. Des morts sans procession. Sans prière. Sans adieu. Des morts comme en temps de guerre. Nous sommes las de cette absence de sens comme l’écho d’un long silence.
Et pourtant… Notre vocation est de refuser de mourir couché. D’être rageusement libres. D’être les hérauts des messages qui préviennent, des actes qui sauvent. De faire face, de casser les impasses.
Restons debout pour être dignes de vivre, étincelants et impavides, héroïques et stellaires. L’espoir chevillé à notre quotidien de combat et de ferme volonté de vaincre.
A Papa Diouf, mort du Covid19 !
El Hadj Hamidou KASSÉ Philosophe/Écrivain
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