Le 20 novembre 1991, notre pays sâest dotĂ© dâun nouveau code Ă©lectoral Ă la suite dâune maĂŻeutique collective dĂ©roulĂ©e sous la direction du regrettĂ© Juge KĂ©ba MBAYE. Les tĂ©moins de lâĂ©poque nous racontent que nous sortions alors de joutes Ă©lectorales tendues, controversĂ©es et souvent violentes (1983 et 1988 notamment).
Ce nouveau code avait suivi une dĂ©marche innovante de co-construction ; il y avait eu, dans un premier temps, une commission cellulaire puis une dĂ©marche inclusive mobilisant les parties prenantes, chacune selon son angle de vue. Le rĂ©sultat final avait alors Ă©tĂ© baptisĂ© « code consensuel ». Sâil est vrai que les Ă©vĂ©nements de 93 avaient fini de dĂ©montrer que le nouveau code Ă©lectoral nâavait pas Ă©tĂ© la panacĂ©e espĂ©rĂ©e, un fait demeure nĂ©anmoins constant ; ce code consensuel avait dĂ©finitivement installĂ© au cĆur des processus Ă©lectoraux de notre pays la logique de recherche permanente du consensus.
Ce rappel historique me semble aujourdâhui particuliĂšrement Ă©clairant. En effet, lâĂ©lection prĂ©sidentielle de 2024 Ă©tait partie pour se tenir dans un contexte prĂ©occupant de rupture du consensus. De quoi sâagit-il, en rĂ©alitĂ© ? Depuis la fin du dialogue national tenu il y a quelques mois, des voix de lâopposition nâont eu de cesse de se lever, Ă diffĂ©rents moments du processus, pour dĂ©noncer des faits ou observations pouvant, selon elle, compromettre la sincĂ©ritĂ© et lâinclusivitĂ© du scrutin. Sur les derniĂšres semaines cette tension a atteint un niveau paroxysmique avec, dans un premier temps, les vives contestations sur le processus de contrĂŽle des parrainages. Des candidats « recalĂ©s » avait dâailleurs exposĂ© au PrĂ©sident de la RĂ©publique, son Excellence Macky SALL, toute leur inquiĂ©tude par rapport Ă ce quâils vivaient comme une injustice.
Par la suite, et sous nos yeux Ă©bahis, sâest ouverte une sĂ©quence ubuesque dans laquelle le pouvoir lĂ©gislatif a gravement mis en cause le pouvoir judiciaire, plus prĂ©cisĂ©ment le Conseil Constitutionnel, gendarme des Ă©lections. Une commission dâenquĂȘte parlementaire a Ă©tĂ© mise en place Ă lâinitiative de lâun des principaux partis dâopposition, Ă savoir le PDS. Partant de lĂ , les dĂ©putĂ©s de la coalition Benno Bokk Yaakaar ont jugĂ© quâil Ă©tait de leur devoir de contribuer Ă ce que toute la lumiĂšre puisse ĂȘtre faite sur cette affaire, sans aucune forme dâobstruction.
Sans aucunement prĂ©juger de la direction que prendront les dĂ©bats suite Ă lâintroduction dâun projet de loi visant le report des Ă©lections, un constat sâimpose sous forme de questionnement lucide ; le PrĂ©sident de la RĂ©publique pouvait-il simplement ignorer cette Ă©vidente rupture du consensus nĂ©cessaire Ă toute Ă©lection apaisĂ©e ? Pouvait-on raisonnablement espĂ©rer que ces joutes Ă©lectorales prĂ©vues le 25 fĂ©vrier auraient, dans ces conditions, abouti Ă un rĂ©sultat incontestable et incontestĂ© ? Nây avait-il pas lĂ un risque manifeste dâavoir un PrĂ©sident « mal Ă©lu » qui, dans un contexte marquĂ© par des menaces protĂ©iformes, nâaurait pas eu les coudĂ©es franches pour mener la barque nationale Ă bon port ?
Câest dans ce contexte quâil faut, Ă mon avis, comprendre la prise de parole du PrĂ©sident de la RĂ©publique du 3 fĂ©vrier dernier. FidĂšle Ă sa promesse de veiller jusquâau dernier jour Ă la stabilitĂ© de notre pays et conformĂ©ment Ă son rĂŽle de gardien des institutions, le PrĂ©sident de la RĂ©publique a pris la seule dĂ©cision qui Ă©tait de son ressort ; surseoir au processus par lâabrogation du dĂ©cret convoquant le corps Ă©lectoral. Deux faits demeurent nĂ©anmoins constants :
âą Lâaction du PrĂ©sident de la RĂ©publique sâinscrira, en toute hypothĂšse et en toute circonstance, dans le cadre de la Loi, en ce quâelle prĂ©voit aujourdâhui ou ce qui la complĂ©tera incessamment sous peu ;
⹠Le Président de la République a réaffirmé son engagement de ne pas participer aux prochaines élections présidentielles.
Il sâagit donc lĂ , en vĂ©ritĂ©, dâun PrĂ©sident de la RĂ©publique jouant pleinement son rĂŽle au service des grands Ă©quilibres institutionnels et privilĂ©giant la recherche permanente du consensus par rapport au « fĂ©tichisme calendaire ».
Jâappelle donc tous les acteurs Ă la retenue et au sens des responsabilitĂ©s. LâhĂ©micycle est dĂ©positaire de la volontĂ© populaire en faisant les lois au nom du peuple sĂ©nĂ©galais. Câest donc dans cette enceinte dĂ©mocratique dont la composition est issue dâĂ©lections qui nâont souffert dâaucune contestation majeure, que les dĂ©bats doivent se tenir dans la sĂ©rĂ©nitĂ© et la retenue.
Je nâai pas le moindre doute sur le fait que notre pays saura renouer avec cette tradition du consensus Ă©lectoral qui permettra au cinquiĂšme PrĂ©sident de la RĂ©publique, que jâespĂšre issu de nos rangs, de prendre Ă bras le corps les enjeux de lâheure, sans perdre la moindre seconde dans des querelles post-Ă©lectorales infĂ©condes.
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